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  • A gauche, la bataille est-elle perdue ?

    charge-des-cuirassiers-francais-a-friedland-ernest-meissonier-1024x564.jpgPendant longtemps, grosso modo entre la fin des années 1970 et les années 2010, le parti socialiste était la force centrale de la gauche française. Le débat interne était vif, l'écart était souvent abyssal entre les sociaux-libéraux à la DSK et les tenants d'une politique économique étatique à la Mélenchon, mais l'édifice tenait. En partie parce que le PS garantissait des bons résultats électoraux aussi bien aux scrutins locaux qu'aux échéances nationales. Le parti socialiste d'Epinay (lieu où il s'était formé en 1971) était une formidable machine à gagner des élections parce qu'il était en phase avec les classes moyennes, ces employés, ces ouvriers qualifiés, ces cadres intermédiaires qui formaient la majorité de la base électorale.

    La montée en puissance du Front national et sa capacité à mettre sur le tapis les frustrations liées à la fin de l'ascenseur social ont réduit l'électorat du PS. Les premiers échecs de la gauche au gouvernement, du temps de Mitterrand, ont affaibli le parti qui voulait représenter la majorité sociologique de la France. La seconde fracture a eu lieu à partir de 2005 et le vote sur le traité européen. Le parti socialiste a été mis en minorité par son propre électorat. Une partie du PS autour de Jean-Luc Mélenchon a considéré qu'il n'était plus possible de rester aux côtés de ceux qui avaient défendu un cadre libéral pour l'Europe. Ils ont donc quitté le PS pour constituer, avec d'autres, le parti de gauche.

    La troisième et dernière fracture est intervenue lors de l'élection présidentielle de 2017. La désignation de Benoît Hamon comme candidat du PS est apparue comme une gifle pour le président sortant. Pour la première fois depuis longtemps, le candidat socialiste était distancé par un autre candidat de gauche (en l'occurrence JL Mélenchon). L'aile droite du PS, à l'image de Gérard Collomb, a choisi de rejoindre la majorité La République en marche, pensant qu'elle amènerait les réformes de modernisation nécessaires à la France. Les partisans de Hamon ont considéré qu'ils n'avaient plus rien à faire au PS et ont créé le parti Génération.s.

    Il ne restait que le coeur central, d'autant que l'aile gauche autour d'Emmanuel Maurel a décidé 18 mois plus tard de prendre la tangente et de se rapprocher des Insoumis. Le parti socialiste est devenu à la faveur de toutes ces recompositions une formation qui ne peut guère espérer être soutenue par plus de 10 % de l'électorat. Il sera intéressant de voir aux élections municipales de 2020 si ses élus locaux, souvent appréciés des populations, seront en capacité de résister à la double attaque de la République en marche et de la France insoumise.

    Reste que cette situation d'éclatement maximal de la gauche pose un vrai problème pour incarner une alternative à Emmanuel Macron. La formation dominante, la France insoumise, si elle suscite beaucoup d'enthousiasme chez une partie, notamment jeune, de l'électorat, n'est pas en capacité de par ses propositions et son style, de rassembler 50 % de l'électorat. Si des convergences ne sont pas construites, la gauche balkanisée devrait vivre de longues années dans l'opposition. Ce peut être l'occasion pour elle de se renouveler. Mais elle risque également de se fossiliser.