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françois fillon

  • UMP : quand "le gentil" s'accommode du "grand méchant loup"

    Lors du duel en fin d'année dernière entre François Fillon et Jean-François Copé pour le contrôle de l'appareil UMP, les rôles semblaient clairs. L'ancien Premier ministre était dans un positionnement plus centriste, ferme dans les valeurs de refus de toute complaisance avec le Front national et ses "valeurs". C'était le "gentil"... Le secrétaire général sortant, le "méchant", apparaissait plus flottant dans ses relations avec le FN : pas d'alliance certes, mais des proximités idéologiques que réfutait fermement Fillon. Jugé plus opportuniste, Copé semblait mettre sur le même plan le centre-gauche incarné par le PS et l'extrême droite de la fille Le Pen, avec sa fameuse théorie du "ni, ni".

    Surprise, voilà que début septembre, le "gentil" faisait cette hallucinante déclaration, rejoignant en cela le "méchant" : en cas de second tour entre un FN et un PS, je voterais, disait-il, pour "le moins sectaire". En n'indiquant pas où était le camp du sectarisme, et comme il tape à bras raccourcis sur la majorité socialiste, critiquant souvent son idéologie sectaire, l'ancien PremierEntrer des mots clefs ministre semblait laisser la possibilité pour un électeur de droite modérée de voter pour un FN. Cette nouvelle brèche ouverte dans le cordon sanitaire, de plus en plus inefficace, contre le parti aux idées extrémistes n'est pas dû au hasard ou à une maladresse de l'ancien Premier ministre. Elle résulte d'un pari électoral qui découle d'un diagnostic sur l'état de la société française.

    Sur un plan électoral, il apparaît à une bonne partie (majoritaire?) de la droite qu'elle ne pourra pas revenir aux affaires sans trouver un compromis avec le FN jugé fréquentable depuis le passage de témoin entre le père et la fille. Comme les références antisémites y sont bannis, du moins en haut lieu, comme trois ou quatre nouveaux leaders qui ne n'ont pas fait leurs classes dans les groupes de jeunesse nationaliste ou nazillons sont mis en avant, il apparaît aux plus naïfs (ou aux plus cyniques) que ce parti a réintégré le bercail républicain. Ils pensent que l'exercice des responsabilités leur fera abandonner leur fonds de commerce anti-européen et anti-étranger. Les plus instruits font référence au scénario italien où l'ancien parti fasciste est devenu un parti (l'Alliance nationale) membre d'une coalition gouvernementale. Ils oublient de rappeler que le partis 'était transformé, avait changé de nom et renouvelé profondément son équipe de direction, ce qui est loin d'être le cas d'un parti qui s'appelle toujours le Front national   

    Il faut dire que le quinquennat de Nicolas Sarkozy a profondément bouleversé les repères. Quand un Président de la République prononce un discours paternalo-raciste devant les Africains (à Dakar en 2007), quand le même s'en prend nommément à un groupe de Français, les gens du voyage (à Grenoble en 2011), quand il conduit la campagne de sa réélection en 2012 (sous l'influence d'un conseiller venu de l'extrême droite), non pas pour rassembler les Français, mais pour cliver parfois avec des relents xénophobes, faut-il s'étonner que celui qui fut son Premier ministre pendant 5 ans considère que tout compte fait, le sectarisme n'est pas le monopole du FN...

    S'il faudrait trouver un compromis avec le "grand méchant loup", c'est que la société française adhérerait à une bonne partie du logiciel frontiste, estiment de nombreuses voix à l'UMP. Il est indiscutable que sur les questions de sécurité, de refus de l'assistance et de volonté d'en finir avec "l'immigration sauvage" (musulmane, sous entendu), les idées du FN trouvent un écho. Même sur l'Europe - qui constitue un vrai clivage avec l'UMP -, la volonté de sortir de l'Union fait son chemin. Le principal parti d'opposition considère qu'il doit se positionner sur ces questions (coller, sauf sur l'Europe, aux thèses du FN) pour éviter qu'une grande partie des électeurs qui adhèrent à ses idées ne se décident à voter pour le parti jusque-là honni. Le pari de certains à l'UMP, c'est que le corps électoral préférera voter pour la copie "light" plutôt que pour l'original. C'est pour le moins risqué pour la vie démocratique dans notre pari. 

    Les prochains mois vont être musclés. Les élections municipales de mars prochain seront marqués par l'installation réelle de groupes politiques FN dans de nombreuses grandes et moyennes villes. Jusque-là, la plupart des élus municipaux frontistes étaient soit des extrémistes incapables de proposer des solutions crédibles aux réalités locales, soit des "pauvres types" incapables d'aligner trois phrases. En 2014, le parti de Marine Le Pen souhaite faire émerger une génération "bleue marine", respectable, crédible qui épouse la diversité de la société française (il y aura sans doute des candidats aux patronymes non européens). De nombreux leaders de droite partant à l'assaut de mairies de gauche vont être tentés de négocier, souvent en sous mains, des accords avec les leaders frontistes. La nécessaire clarté des alliances et des programmes va largement en souffrir. Puisque, comme le laisse entendre François Fillon, le sectarisme est aussi bien au PS qu'au FN, pourquoi ne pas s'allier avec certains leaders frontistes qui paraissent si fréquentables ?  

  • Quand le sarkozysme se décompose...

    Devant le spectacle tantôt pathétique, tantôt grotesque, offert par l'UMP depuis une quinzaine de jours, certains observateurs peu inspirés ont cru y voir l'occasion pour Nicolas Jean-François Copé, françois fillonSarkozy de refaire surface et de se préparer dans l'optique de la revanche de 2017. Ce genre de conclusion (dont on peut tout de même percevoir une résonance avec une nostalgie qui a saisi le petit monde de la politique depuis le départ de l'ancien Président) me semble en décalage total avec la réalité des faits. L'affrontement fratricide dans lequel évolue le principal (?) parti d'opposition est plutôt le signe d'un état de décomposition très avancé de l'héritage sarkozyste. On a même le sentiment que la rapidité et la brutalité des événements qui ont conduit à l'éclatement (difficilement réversible) de l'UMP sont à la mesure de l'empressement qu'avait eu Nicolas Sarkozy à prendre le contrôle de la droite.

    Il faut bien faire dresser le bilan politique du sarkozysme. Et il n'est pas glorieux ! En cinq années, la droite a perdu de nombreux départements, des villes grandes et moyennes et surtout un Sénat jugé imprenable voici peu. Il a crédibilisé les thèses d'une extrême droite en faisant apparaître la fille Le Pen comme finalement présentable. Le FN qu'il avait Jean-François Copé, françois fillonsérieusement esquinté en 2007 grâce à une campagne audacieuse a repris du poil de la bête. La frontière, quasi étanche, que Jacques Chirac avait réussi à établir entre la droite républicaine et celle qu'on est obligé d'appeler extrême s'est complètement effrité.

    Cela n'effraie plus bon nombre d'électeurs UMP de reporter leurs voix, au second tour, sur un candidat frontiste. Ce qui explique pourquoi de nombreux seconds tours FN/gauche lors des législatives de juin ont donné lieu à un résultat du type 45/55 voire 52/48. Auparavant, un frontiste ne dépassait que rarement la barre des 40% lorsqu'il devait affronter un candidat de gauche au second tour. Sauf à être dans une exaltation quasi pathétique de "Nicolas", il est tout de même difficile de ne pas considérer que cette situation a quelque chose à voir avec la façon dont l'ancien Président a joué avec quelques allumettes au prix d'un piétinement assez méthodique de ce qu'il restait de l'héritage gaulliste. 

    Pourquoi en est-on arrivé à cette situation explosive à la tête de l'UMP ? Bien entendu, on peut simplement stigmatiser la guerre des chefs, le choc des egos et tutti quanti. Pour ceux qui seraient nés en politique voici peu, rappellons les épisodes assez virils entre Chaban et Chirac (1974), entre VGE et toujours Chirac (de 1976 à... aujourd'hui), entre Balladur et encore Chirac (1993-1995), sans oublier, même si c'était finalement assez exotiques, les bisbilles entre Sarkozy et Villepin. Donc, rien de neuf sous le soleil, sauf que cette fois-ci, les conséquences sont lourdes.

    Deux raisons majeures expliquent, selon moi, la gravité des conséquences de cette crise. D'une part, l'absence de culture démocratique, le refus de vivre des désaccords. On l'a oublié, mais la création de l'UMP, en 2002, a démarré sur un mensonge. Pour rassembler toute la famille éclatée allant du centre-droit ) la droite dure, promis-juré, l'UMP allait faire vivre le débat entre les sensibilités différentes (on ne parlait pas de courant pour ne surtout pas ressembler au PS). Cela n'a jamais existé à l'UMP car le chef Sarkozy n'en voulait pas. Pas question de se "faire emmerder" avec la perte de temps et d'énergie que représente le débat d'idée ; la démocratie, c'est bon pour les discours, pas pour prendre le pouvoir.

    Mais voilà que le chef perd le pouvoir... Rien n'a été prévu pour faire vivre ce moment d'hésitation, de maturation démocratique. On a à la tête du parti un mini-Sarko (le talent en moins) qui est prêt à tout pour garder le pouvoir. Il ne lâche même pas l'appareil le temps de la campagne interne, l'utilisant de façon éhontée à son seul avantage. Son rival, qui a envie d'exister par lui-même pour faire oublier sa vassalisation pendant cinq ans, ne s'intéresse même pas aux questions statutaires pourtant déterminantes dans toute phase électorale. Et il a suffi d'un scrutin très serré pour que le chateau de carte d'une organisation bricolée et caporalisée s'effondre en 48 heures. Surtout qu'une partie des adhérents à cheval sur les principes moraux n'a pas l'intention de se faire "voler" l'élection... 

    L'autre raison qui n'a peut-être pas été assez développée, tient à la libération de la violence en politique qu'a permis voire encouragé Nicolas Sarkozy. Entre les "casse-toi, pauv'con !", la banalisation de l'humiliation (de François Fillon à Patrick Devedjian en passant par Jean-Louis Borloo) et cette façon de faire en permanence la leçon à nos partenaires étrangers, l'ancien Président a trop souvent confondu authenticité et vulgarité, refus du "politiquement correct" et celui de la courtoisie toute républicaine. Il a installé dans le pays l'idée selon laquelle il fallait être malin, roublard voire menteur pour garder le pouvoir et en jouir. Passant sans arrêt d'une idée à l'autre, d'une priorité à l'autre, d'un fait divers à un autre, affichant jusqu'à l'impudeur les affres personnels de tout homme, fût-il président français, il a, avec un talent qu'on ne lui contestera pas, donné le tournis à tout le monde.

    Un certain noJean-François Copé, françois fillonmbre de repères ou de bornes, par exemple la capacité de la négociation en coulisses (qui aurait bien utile pendant les 48 heures suivant le scrutin de l'UMP) ou celui du compromis ont complètement volé en éclat. A cet égard, Jean-François Copé aura été le meilleur élève de cette école du cynisme en politique qui aboutit à ce résultat complètement fou : le jouet de Sarkozy, l'UMP, n'aura pas résisté à la chute de ce dernier !

     

  • Primaires : pourquoi la droite n'a rien compris

    Voilà donc François Hollande désigné à une majorité très large, en ayant réussi à préserver le même écart que cnicolas sarkozy, françois hollande, françois fillonelui qui le séparait, au premier tour, de Martine Aubry. Pour le vrai rendez-vous avec le pays, l'homme fort de la Corrèze part avec un avantage certain : ces primaires ont mobilisé près de trois millions de citoyens et elles ont permis de dégager un résultat est très net. La droite ne pouvait pas redouter pire situation. Non seulement elle se retrouve face à un candidat redoutable – bon débatteur, calme, attractif pour le centre droit -, mais toute sa stratégie de discrédit des primaires a échoué. En l'occasion – et en tant d'autres -, elle se retrouve dans l'incapacité de saisir les attentes d'un corps électoral dont elle entend susciter l'adhésion. C'est fâcheux quand on aspire à conserver le pouvoir et pas simplement à proposer une candidature de témoignage.

    L'UMP, en tout cas ses deux pôles principaux (la direction du parti, avec le peu subtil Jean-François Copé, et l'Elysée), s'est trompé sur toute la ligne. Rappelons-nous la succession des attaques contre ces primaires citoyennes. Elles ont d'abord été accusées d'organiser le fichage de la population – l'accusation n'a pas fait long feu -, puis on leur a prédit un bide en termes de participation. Le pronostic était d'autant plus imprudent que toutes les enquêtes d'opinion – et l'audience des débats télévisés – révélaient un intérêt fort dans l'opinion publique pour ce mode de désignation des candidats à l'élection suprême. Et puis au soir du premier tour, la droite, prisonnière des éléments de langage élyséens, a sort la grosse caisse : ouh la la, le résultat sera serré et la guerre des chefs va se réinstaller au soir du 16 octobre. Le piège était un peu grossier d'autant que la mobilisation populaire oblige le PS à avoir le sens des responsabilités. Si bagarres il y a (et il y en aura) dans les prochaines semaines, les socialistes ne sont pas complètement demeurés pour étaler leurs bisbilles en public, surtout un soir de l'élection.

    Ce raté magistral qui tient tant de l'erreur d'analyse sur l'état de la société (le besoin de respiration démocratique) que de la volonté de taper à bras raccourcis sur les socialisnicolas sarkozy, françois hollande, françois fillontes pourrait, une nouvelle fois, aggraver le malaise au sein de la majorité. La seule personne qui a eu une position lucide sur les primaires n'est autre que le Premier ministre qui en a salué le succès et la modernité. Ce n'est pas la première fois que François Fillon se singularise par rapport au chef de l'Etat – et l'ennemi juré, J.-F. Copé – mais cette affaire va au-delà d'un simple désaccord gouvernemental. Il s'agit de la conception qu'on a de la fonction présidentielle. La question que vont poser dans les semaines à venir les (rares et courageux) trublions de la droite est celle qui traverse le pays depuis les derniers échecs électoraux (municipales, régionales et surtout sénatoriales) : le président de la République a-t-il un droit automatique à se représenter sans que son bilan ne soit examiné et que des candidatures plus crédibles ne soient sollicitées ? Autrement dit, l'UMP doit-elle, peut-elle accepter que son suivisme vis-à-vis d'un président qui se coupe de plus en plus du peuple, non seulement le conduise à un échec probable, mais en plus risque un implosion au lendemain de législatives où son groupe parlmentaire pourrait fondre de moitié ?

    Mais les cnicolas sarkozy, françois hollande, françois fillonhoses devraient se passer autrement. Nicolas Sarkozy cherchera à se succéder à lui-même et il prendra sa décision sans consulter qui que ce soit, si ce n'est les beni oui oui de l'Elysée et ceux dans l'appareil dont la servilité n'a d'égal que le manque de culture politique, du genre Nadine Morano. Vu le manque criant d'espace de débat au sein de l'appareil UMP, il est peu probable que des voix fortes s'élèvent pour critiquer la décision élyséenne. Tout le monde assurera que bien sûr que c'est le meilleur choix, qu'il a su éviter à la France la bourrasque qu'ont connue certains de nos voisins avec la crise, et patati et patata.

    Sur le terrain, les maires, les parlementaires qui assurent toutes les semaines des permanences dans leur circonscription entendent un tout autre discours : celui d'un pays qui ne supporte plus l'étalage des richesses alors que tant de salariés survivent avec le Smic ; d'une population qui n'en peut plus de voir ses gamins passer de stage en stage, de CDD en CDD, quand ils n'ont pas tout simplement décroché pour préférer s'évader dans la « défonce » ou les réseaux sociaux. Les 80 % de la population inquiète pour l'avenir de ses enfants va très mal vivre le vacarme médiatique qui risque d'accompagner fleurir la naissance de l'enfant du président. L'exaspération risque de monter d'un cran dans ce pays : une partie de ceux qui ont voté Sarko en 2007 vont se dire que non seulement « on » les a trompés, mais qu' « on » est incapable d'admettre les échecs et d'en tirer des conséquences.

    L'acharnement des responsables UMP à combattre toute idée de primaire – ou à la renvoyer aux calendes grecques – tient sans doute à l'intuition présente ici ou là que, dans le cadre d'une primaire ouverte au « peuple de droite », le président sortant pourrait être battu par un Fillon ou un Juppé. Alors, pour éviter de se rendre à l'évidence – que la candidature Sarko mène très probablement la droite dans le mur -, les leaders de l'UMP ont choisi une autre tactique : taper sans discernement sur les primaires. Manque de bol pour elle, tous ses arguments lui reviennent comme un boomerang.

    Projetons-nous dans les six mois. Lorsque le débat au second tour opposera Hollande à Sarkozy (pour peu que celui-ci parvienne à distancer Marine Le Pen...), le premier ne manquera pas de rappeler au second que sa candidature à lui a été avalisée après un long processus et deux votes, alors que la sienne ne procède que de sa volonté souveraine et du suivisme de quelques caciques de l'UMP (dont certains ont tout intérêt à la défaite en 2012). Il va sans dire que le candidat sortant aura bien du mal à reprendre les arguments – pour le moins fragiles – qui ont servi à discréditer la désignation d'un candidat par un corps électoral élargi. La primaire apparaîtra alors comme une formidable machine de guerre contre la logique bonapartiste du président sortant. Et le piège se refermera sur une majorité qui, en l'occurrence, a oublié se se servir de son intelligence politique.

  • Les cantonales, le "coup de Munich" et 2012

    L'UMP est dans la seringue du Front national et ne sait pas comment en sortir. Le problème pour elle, c'est qu'elle s'y est mise toute seule. En deux phrases lapidaires, voilà comment on peut résumer la sitLe Pen fille.jpguation politique française au lendemain d'un premier tour d'élections cantonales calamiteux, au regard de l'abstention massive (plus de 55 % et parfois dans certains quartiers populaires de près des deux tiers) et de l'implantation des thèses de Marine Le Pen. Celle-ci dipose certes d'une présence militante du Front national encore limitée, mais dans n'importe quel canton, il lui suffisait de présenter un inconnu - jeune, vieux, homme, femme : aucune importance -, de l'affubler d'un portrait de la chef du FN pour rassembler à coup sûr 8 à 10 % et, si le terreau était fertile (délocalisations, quartiers sensibles abandonnés, frontières terrestres proches), multiplier le jackpot par deux ou trois.

    Dans cet entre-deux tours qui a du mal à passionner le pays, on se retrouve avec une situation très particulière: le FN sera présent dans près de 400 cantons, après avoir concouru dans 1440 cantons. Près d'une fois sur trois, le parti de Marine Le Pen se qualifie pour le second tour, avec parfois dix points d'avance sur l'autre candidat qualifié! Le plus drôle, si on peut dire, c'est que le relèvement du seuil pour être qualifié au second tour (12,5 % des inscrits au lieu de 10 %) décidé par l'UMP devait justement empêcher le FN d'être qualifié. Avec une si faible participation, les triangulaires sont devenues aussi rares que le nombre d'élus MoDem, mais les éliminés ne sont pas ceux qu'on croit.

    Sept fois sur dix, le porte-drapeau du FN sera confronté à un candidat de gauche (204 PS, 37 PCF, plus quelques divers). Ce qui signifie que dans plus de 250 cantons de la République, la droite présidentielle, qu'elle soit UMP tendance dure ou molle, centriste façon Nouveau Centre ou divers droite, ne sera pas représentée. Rayée de la carte, éliminée! Pour un parti qui entendait imiter les exemples anglais, allemand ou espagnol en formant un grand parti populaire, la déconvenue est violente.

    Alors maintenant que dire aux électeurs de droite orphelins de leur candidat pour leSarko 3.jpg second tour? A l'UMP, c'est la cacophonie. La ligne Copé/Sarkozy, suivie par l'essentiel de l'appareil, est finalement celle du candidat communiste Jacques Duclos en 1969 (cela ne nous rajeunit guère...) disant, à propos du duel Poher-Pompidou, avec son accent rocailleux : « Bonnet blanc et blanc bonnet! ». Mais là, l'affaire est plus compliquée car il ne s'agit pas de choisir entre un néo-gaulliste de droite et un néo-démocrate chrétien de centre-droit, mais entre un candidat de gauche et un candidat épousant, qu'il le veuille ou non, les théses de l'extrême droite.

    Si on comprend bien la position officielle, en tout cas élyséenne, c'est justement pour ne pas renforcer le FN qui dénonce une collusion entre l'UMP et le PS (parlant d'UMPS) qu'il ne faut pas appeler à voter pour le candidat de gauche. C'est donc pour conserver le pacte républicain qu'il faudrait tourner le dos au front républicain. L'argument peut séduire, mais est tout de même un peu spécieux et au final, dangereux. Une nouvelle fois, l'UMP fait le jeu du Front national puisqu'il se positionne sur son terrain. Depuis deux ans, le parti présidentiel a calé ses pas sur la marche du FN, en lançant ce calamiteux débat sur l'identité nationale puis en entonnant la nauséabonde dénonciation des Roms et des jeunes délinquants étrangers, et enfin en annonçant un fumeux débat sur l'islam (rebaptisé en catastrophe débat sur la laïcité). Voilà qu'il a peur de ses convictions, républicaines ose-t-on penser, pour ne pas chiffonner la grande blonde et ses électeurs remontés contre les trahisons du Président Sarkozy.

    En face de ce nouveau coup de Munich (en référence à la lâche trahison des démocraties occidentales devant les vociférations d'Hitler), quelques voix, celles de centristes (Borloo, Arthuis), de rares ex-chiraquiens (Pécresse) et du Premier ministre, tentent de faire entendre raison à la droite sarkozyste. Ils ont très peu de chances d'être entendu par un parti paralysé par la double peur des coups de menton de Marine Le Pen et des coups de poker permanents de son chef.

    La question qui est posée, mais que personne n'a le courage de soulever au sein de l'UMP se dessine encore plus nettement au regard de cette nouvelle bérézina électorale: le président sortant est-il le bon candidat pour la droite en 2012 si elle veut tout simplement ne pas être éliminé dès le premier tour et se retrouver à arbitrer un duel PS - FN? Si un tel scénario survenait (et le premier tour vient de confirmer que ce n'est pas simplement une lubie de sondeur...), il ferait éclater à coup sûr le parti qui se voulait, voici peu, majoritaire. C'est donc une opération survie pour la droite qui est engagée.

    Le choix du débat et de la démocratie interne qui a été méthodiquement écarté depuis le lancement de l'UMP (malgré la promesse d'un parti ouvert et pluraliste) est la seule voie possible pour une formation aux abois. Sans cette ouverture, le parti pourrait voir certains de ses membres, notamment dans les régions où le FN représente un électeur sur quatre, faire les yeux doux à la blonde de l'extrême droite soft et d'autres s'affranchir de la dérive droitière pour créer un pôle plus centriste. Ce débat nécessaire ne rendrait pas la politique du gouvernement plus populaire, ni lui ferait retrouver une cohérence incompatible avec l'instabilité chronique de notre Président, mais lui permettrait de retrouver la lucidité qui l'a quitté depuis belle lurette et d'examiner ses chances de survie en 2012. Il faut espérer pour l'UMP - et aussi pour le jeu démocratique - que François Fillon, après cette distanciation salutaire avec l'Elysée, n'en reste pas là face à l'autisme suicidaire des curieux conseillers de Nicolas Sarkozy.