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  • Législatives : la révolte des territoires

    Ségolène Royal en passe d’être battue (ou du moins fortement inquiétée) par un dissident socialiste, ancien premier secrétaire fédéral de Charente-Maritime ; des législatives,ségolène royal,parachutage,décentralisationcandidats UMP ou PS qui passent outre les consignes de l’appareil parisien, ici pour se maintenir (dans le Vaucluse), ailleurs pour se retirer (dans les Pyrénées orientales), Claude Guéant en situation difficile à Boulogne-Billancourt face à l’ancien premier adjoint de la ville, sans oublier des candidats écolos dépassés (parfois largement) par des socialistes non investis nationalement… cette élection législative a été marquée par la grande fronde des militants locaux face aux consignes (ou oukazes) de leur appareil.

    Bien entendu, on se saurait oublier le laminage par le PS des autres forces à gauche (le Front de gauche, très en forme à la présidentielle, pourrait perdre son groupe parlementaire), l’ancrage profond, notamment, et c'est nouveau, en milieu rural, d'un Front national décomplexé (ce qui le rend d’autant plus dangereux) et la disparition possible de représentants du MoDem.

    Mais en prenant un peu de recul, par-delà la multiplication des polémiques, tweetisées ou pas, ce qui est frappant dans cette affaire, c’est bien ce sentiment que les territoires s’autonomisent de plus en plus du centre politique qu’est Paris. D’ailleurs, l’écart entre le comportement électoral de la région parisienne (affirmation du PS, résistance inégale de l’UMP, faibles scores FN et étouffement du PC qui pourrait perdre plus de la moitié de ses représentants) et celui de la moitié Est de la France (où les tendances inversées se remarquent) est éclairant sur les diféfrences très profondes de comportement qui saisissent notre pays.

    Voici une ou deux décennies, la menace d’une exclusion faisait très souvent reculer les volontés (ou velléités) d’autonomisation politique. Aujourd’hui, la plupart des candidats savent qu’une grande partie de leur score est due à leur notoriété ou aux réseaux qu’ils ont su mailler sur le territoire. Ceci explique, en grande partie, pourquoi l’essentiel des ministres du gouvernement Sarkozy devraient être réélus malgré des scores impressionnants de François Hollande le 6 mai dernier. Si Nadine Morano ou Nathalie Koziusko-Morizet sont bien parties pour abondonner l’assemblée, c’est que leur ancrage est loin d'être aussi solide qu’elles veulent bien le dire. N’oublions pas que la première a échoué à prendre la mairie de Toul et que la seconde est devenue maire de Longjumepar la grâce de quelques dizaines de voix d’avance.

    En 2012, les équipes politiques locales font à peu près ce qu'elles veulent et sont, en général, légitimées par les citoyens. Cela s'explique par différents facteurs. D'une part, du fait de l'instauration du quinquennat et de l'inversion du calendrier électoral (merci Lionel !), l'élection des députés est devenue une élection secondaire, presque une formalité. Elle confirme, de façon forte ou plus mesurée (comme en 2007 où l'écart avait été moins important que prévu entre la gauche et la droite), le résultat de la présidentielle qui la précède d'un mois. C'est une des raisons pour laquelle le Front de gauche a échoué, les électeurs se demandant si celui-ci faisait ou non partie de la nouvelle majorité.

    D'autre part, et cela est corrélé avec ce qui précède, les enjeux idéologiques, les clivages partisans, même s'ils sont encore présents, apparaissent comme très atténués par rapport à ce qu'ils purent être dans les années 70 et 80. et surtout, ils ne concernent qu'une frange réduite, très politisée de la population. Dans un contexte de crise des territoires, ruraux, industriels et péri-urbains, les électeurs cherchent surtout l'élu qui a suffisamment d'assise locale et/ou de contacts parisiens (d'où le succès des ministres des gouvernements actuel et précédent) pour les protéger ou pour atténuer les chocs à venir.

    La troisième raison résulte de l'aboutissement de la logique de décentralisation qui a fait émerger des pouvoirs locaux puissants et des chefs influents. On peut le regretter, mais c'est ainsi, le maire de Lyon, par exemple, ne peut accepter que législatives,ségolène royal,parachutage,décentralisation« Paris » lui impose un élu écolo trublion (Philippe Mérieu) dont il ne veut pas. Ailleurs, la logique locale a produit des effets plus intéressants puisqu'elle a permis de faire émerger des personnalités que jamais l'échelon national n'aurait retenu. C'est ainsi que face à l'irremplaçable Nadine Morano (qui risque de perdre dans ce scrutin et son siège et son honneur), les militants socialistes du Toulois (Meurthe-et-Moselle) ont choisi un agriculteur bio, maire de son village. Encore une fois, la décentralisation n'aboutit pas forcément à des constiitutions de féodalités locales, aux moeurs parfois détestables (comme ce fut le cas autour de Georges Frêche), parfois elle est facteur de débats locaux et de renouvellement démocratique.

    Voilà donc les appareils prévenus. Ils doivent changer leur façon de considérer le terrain, de ne pas en faire des chasses gardées dans des logiques de fief attribué à telle ou telle personnalité. Il n'est pas interdit qu'une personnalité, parisienne ou autre, souhaite s'implanter dans un territoire qui n'est pas le sien. Cela peut même être souhaitable dans certains territoires appauvris ou gangrénés par les systèmes plus ou moins mafieux (comme dans les Bouches-du-Rhône). Cela peut permettre de renouveler les pratiques et d'amener du sang neuf. Mais dans ce cas-là, lesdites personnalités doivent faire le choix de s'y implanter plusieurs années avant l'élection pour que la greffe prenne et surtout se soumettre aux procédures de droit commun (le vote dans le cadre de primaires internes ou, espérons-le bientôt ouvertes aux citoyens). Sinon, elles prennent le risque, comme à la Rochelle, de provoquer une dissidence qui pourrait être victorieuse.

    L'état d'inquiétude qui traverse notre pays suppose des réponses politiques à la hauteur, mais aussi des façons de faire plus douces, moins imposées d'en-haut. Un pays traumatisé par les coups de menton du sarkozysme et par les aléas de la conjoncture internationale ne peut plus accepter que la logique napoléonienne soit encore celle des appareils parisiens.Par exemple, il est tout à fait incompréhensible que dans le cas d'un duel de deux candidats de gauche, l'un doit s'effacer au nom de je ne sais quelle discipline dite républicaine. Dans une démocratie, les citoyens sont souverains ; ils acceptent de moins et moins que des chefs de partis à la base de plus en plus faible, de moins en moins représentatifs sociologiquement, dictent la conduite à suivre dans telle ou telle circonscription. Une page se tourne. A bon entendeur, salut !