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ségolène royal - Page 3

  • PS - Europe écologie : les vases communicants

    En novembre 2008 se tenait le calamiteux congrès de Reims, centré sur la personnalité de Ségolène Royal. Grâce à un rapprochement des contraires (de Hamon à Delanoë) puis un micmac lors du vote des militants, la candidature de celle-ci au poste de première secrétaire avait été écartée. Un an plus tard, la même Royal fait reparler d'elle en perturbant une rencontre plurielle sur l'éducation à Dijon. Inutile derevenir sur l'impasse pPeillon et Royal.jpgolitique que représente l'ancienne candidate à la présidentielle (voir une note précédente). Les critiques de Vincent Peillon concernant son ancienne « patronne » résument assez bien les reproches qui sont adressés à Ségolène Royal : trop personnelle, trop imprévisible et pas assez travailleuse. Il est cependant curieux qu'il ait mis autant de temps à se rendre compte de ces carences...

    Cette prise de bec serait finalement assez anecdotique si le PS affichait par ailleurs une bonne santé. Tel n'est pas le cas. Les seuls débats qui aient avancé en douze mois concernent le non-cumul des mandats (mais les barons ne veulent rien lâcher là-dessus) et l'organisation des primaires (qui, paradoxalement, pourraient encore plus désintégrer le PS). Commentant la querelle Royal-Peillon, Martine Aubry a dit préférer le PS qui travaille. De quoi parle-t-elle exactement? Car le PS qui travaille, on le cherche en vain. Une convention sur l'entreprise qui devait avoir lieu cet automne a été reportée à l'après-régionales. Sur la lutte contre le réchauffement climatique, sur la protection des travailleurs face à la montée du stress, sur la régularisation des sans-papiers, sur la montée de la misère... on attend en vain des contre-propositions audacieuses et chiffrées.

    Le seul domaine où le PS semble en pointe, c'est la défense des collectivités locales menacées par les divers projets de l'exécutif. La mobilisation des élus lors du congrès de l'AMF montre la force de frappe du PS en la matière. Un parti inaudible sur les questions de société et économiques, mais arc-bouté sur la défense de ses fiefs... cela rappelle furieusement la SFIO vieillissante des années 60.

    Pendant ce temps-là, une formation engrange des soutiens et des ralliements. Emmenée par une remarquable Cécile Duflot, Duflot.jpgEurope écologie (et dans une moindre mesure le Parti de la Gauche) paraît en mesure de drainer les millions de déçus du PS. Dynamisée par son succès aux européennes, Europe écologie élargit progressivement son assise en récupérant des cadres socialistes déçus par la passivité de leur parti. C'est le cas d'Eric Loiselet, l'un des animateurs du Pôle écologiste (l'une des seules nouveautés du dernier congrès) et de Pierre Larrouturou qui a tenté en vain de déposer une motion à Reims (et qui s'est rallié en désespoir de cause à Benoit Hamon, lequel a très vite oublié ses soutiens de congrès...). Ceux qui tentent de faire bouger la doctrine et les pratiques de ce parti en le faisant sortir de ses ambiguïtés permanentes baissent les bras ou choisissent un autre chemin politique. Restent dans l'appareil ceux qui sont obsédés par la conquête du pouvoir, misant d'ailleurs plus sur 2017 que sur 2012.

    Les prochaines élections régionales risquent d'être marquées par une déconfiture du parti socialiste. La bonne qualité des candidats sur le terrain, le bilan plutôt bon des exécutifs régionaux ne pourront éternellement masquer l'état de déshérence politique du parti socialiste.

  • Pourquoi Ségolène patine

    site Désirs d'avenir.pngIl y a des signes qui ne trompent pas. Sur Rue89, un article assez ironique revenant sur les réactions au lancement du nouveau site de Désirs d'avenir (1) a suscité en 24 heures près de 200 000 visites et 130 commentaires. C'est énorme: à titre de comparaison, un article reprenant des accusations de Daniel Cohn-Bendit sur la triche au PS, et mis en ligne une journée plus tôt, a rassemblé huit fois moins de visiteurs (c'est pourtant une bonne fréquentation pour un article politique). Voilà qui est incontestable: Ségolène Royal est la personnalité politique qui suscite le plus de passions. Sans doute plus encore que Nicolas Sarkozy qui réactive un clivage gauche/droite.

    L'ex candidatSégolène Royal.jpge socialiste, elle, divise profondément l'électorat de gauche. Chacun connaît, dans son entourage, une personne de gauche qui serait prête à se faire moine pour qu'elle se représente en 2012 et une autre qui clame haut et fort qu'elle préfèrerait voter blanc que de mettre un bulletin Ségolène Royal. Parmi les commentaires qui peuvent être lus sur Rue89 (la plupart portent sur le coût prohibitif de ce site et son design jugé ringard), deux, fort contrastés, résument l'extrême polarisation autour de Royal. Côté défense : « Plus la femme politique est attirante sexuellement, plus cette haine se fera globale et totale. » Côté accusation: « Si elle n'a pas le recul nécessaire pour voir qu'un simple site créé à la va-vite avec un budget exorbitant peut s'avérer catastrophique, qu'en aurait-il été de la conduite d'une nation ? »

    Le machisme de la société française ou l'incompétence et l'amateurisme de « Ségolène »... les points de vue, caricaturaux, semblent ne pas avoir bougé depuis la campagne de 2007. En deux ans, pas grand-chose n'a changé de ce point de vue-là, et c'est un échec indéniable pour la socialiste qui entendait « crédibiliser » sa personne. Et pourtant, entre 2007 et 2009, il s'est passé moult évènements qui auraient dû modifier cette image. Ségolène Royal a été l'une des personnalités les plus opposées au Président de la République; sa personnalité a dominé le congrès du parti socialiste à Reims et n'a pu devenir premier secrétaire que par une alliance très fragile des contraires (de Benoît Hamon à Dominique Strauss-Kahn) lors d'un scrutin pour le moins douteux; son plaidoyer pour la rénovation du PS (fin du cumul des mandats, transparence des votes, primaires pour la présidentielle) a été repris presque tel quel par Martine Aubry qui n'avait pourtant pas de mots assez durs sur son inconsistance politique...

    Comment comprendre ce paradoxe d'une femme qui arrive à faire passer une partie de ses idées, mais qui continue à diviser l'madame Royal.jpgopinion publique, notamment à gauche? Dans un livre passionnant publié en 2005, Madame Royal (éditions Jacob-Duvernet), le journaliste Daniel Bernard écrivait justement: « Ségolène Royal colle à la France d'aujourd'hui, c'est-à-dire à ses contradictions. En quatre mots répétés à satiété - « en même temps » - elle dit tout des hésitations françaises. […] Oui au mariage gay et « en même temps » oui aux « familles au carré ». Pour le maintien des bureaux de poste et des écoles en zone rurale « et en même temps » contre les augmentations d'impôts. […] Ségolène veut tout à l'image de la société française des années 2000. »

    Ségolène Royal n'a pas profondément changé par rapport à cette description psychologico-politique. Ses dernières expressions publiques – sur la taxe carbone, sur les accusations de fraude électorale au PS – traduisent un grand écart. Elle veut une révolution écologique dans nos modes de vie mais refuse catégoriquement – et sans proposition alternative crédible – la taxe carbone proposée par Rocard/Sarkozy. Elle exige la vérité sur le scrutin interne de novembre dernier (dont les anomalies avaient été déjà relevées dans la presse) tout en se déclarant attachée à l'unité du PS. Le drame de Royal, c'est qu'elle a une vraie difficulté à clarifier les termes d'un débat et à choisir une voie. Dans les deux exemples cités, que retiendra-t-on? Davantage le côté contre (la taxe carbone, l'unité du PS) que la dimension propositionnelle.

    La lassitude qui s'exprime à son égard dans l'opinion publique – et même chez certains de ses amis – vient sans doute de cette impression de flottement permanent et d'hésitation qu'elle dégage. Face à un Président dont on décèle souvent le côté versatile, imprévisible voire opportuniste, l'opposition de gauche a besoin de rassurer, d'incarner des lignes claires et de défendre un projet assumé. La direction actuelle du PS est loin de répondre à de tels objectifs, mais celle qui la conteste plus ou moins ouvertement ne donne pas non plus ces gages. Reste que dans l'éventail des opposants au chef de l'UMP, la présidente de Poitou-Charentes garde un socle solide de popularité. Notamment dans les espaces ruraux et parmi les couches populaires, elle incarne une part de rêve qui fait cruellement défaut aux Aubry, Valls, DSK et autre Hollande. Comment concilier les deux – la popularité et le sérieux – dans une alternative à Sarko? Personne au PS n'a semble-t-il de réponse à cette question déterminante pour 2012.

    (1) http://www.rue89.com/2009/09/17/segolene-royal-modifie-son-site-mais-le-net-na-pas-fini-den-rire

     

  • Européennes: la grande frousse du PS

    aubry.jpgA deux semaines de l'élection des députés européens, tout l'appareil socialiste est aux abois. Non seulement – si on se réfère aux sondages – le PS a toutes les chances d'être loin derrière les listes présentées par l'UMP, mais il pourrait être en-dessous de la barre symbolique des 20 %. La situation politique est totalement paradoxale : le gouvernement multiplie les mécontentements (université, services publics, syndicats...), la France est entrée dans une phase de récession qui pourrait durer plusieurs mois, la côte de popularité du Président de la République est au plus bas... mais le principal parti d'opposition ne parvient pas à engranger les fruits politiques d'une conjoncture qui théoriquement lui offrirait un boulevard.

    Les raisons de ce paradoxe ne manquent pas et il faut les prendre en compte dans leur globalité. Première raison qui saute aux yeux de tous les citoyens: le parti socialiste, est totalement divisé entre chapelles qui non seulement s'ignorent mais se font la guéguerre. Le dernier congrès de Reims en novembre 2008 aurait dû clarifier la question du leadership. Il n'a fait que la compliquer. En constituant une très courte majorité (une centaine de voix de différence dans un climat de contestation), faite de bric et de broc (allant des amis de Benoît Hamon à ceux de Bertrand Delanoë en passant par ceux de Laurent Fabius), Martine Aubry n'a absolument pas clarifié la ligne politique du PS. Comme on pouvait s'y attendre, elle doit, pour se maintenir, à son poste ne mécontenter aucun des leaders politiques qui l'y ont amené. Comment, dans ces conditions, entraîner le parti dans cet élan de rénovation dont tout le monde en interne fait ses gorges chaudes? En face, le camp Royal est plus divisé que jamais entre les supporters de Ségolène Royal, les amis de Vincent Peillon décidés à exister par eux-mêmes et les grands barons régionaux qui ont repris leur autonomie, soucieux de la préservation de leurs intérêts.

    Seconde raison: le PS, même s'il a repris le chemin des manifestations, n'a pas repris pied dans la société civile. Les syndicats, les grandes associations continuent à le laisser à distance, inquiets de toute tentative de récupération et fatigués par sa paresse intellectuelle et ses atermoiements. Même si ce parti continue à avoir des militants engagés dans le corps social, ses dirigeants (blancs, quinquagénaires voire sexagénaires, hauts-fonctionnaires, élus depuis des décennies) inquiètent par leur détestation réciproque et leur incapacité à se remettre en cause. A tort ou à raison, on se dit que François Hollande, à qui on a reproché son inertie politique après la débâcle de 2002, veut prendre sa revanche, que les amis de DSK ne travaillent qu'au retour parisien de l'actuel directeur du FMI, que Benoît Hamon travaille déjà pour la présidentielle de... 2017, que Laurent Fabius et Bertrand Delanoë sont en embuscade au cas où... On a bien compris que Ségolène Royal pense être incontournable pour 2012 et qu'elle va jouer, s'il le faut, l'opinion contre le parti. Quel ouvrier menacé de chômage, quel étudiant terrorisé pour son avenir, quel fonctionnaire inquiet par l'état des services publics, quel citoyen alerté par les atteintes à la démocratie peut s'intéresser à ce petit monde d'intrigants coupés, quoi qu'ils en disent, des réalités populaires?

    La troisième raison du risque de « dégelée électorale » pour le PS découle des deux précédentes. Elle tient à la composition des listes pour les européennes. Celles-ci ont été composées en dépit du bon sens qui voudrait qu'on ne reprenne que les députés sortants non cumulards et ayant fait les preuves de leur travail au Parlement européen et qu'on investisse des candidats investis dans leur région et pouvant apporter une expertise, une expérience sur les enjeux de la construction européenne (la redéfinition de la PAC, la construction de normes sociales, l'affirmation d'une politique étrangère commune, le renforcement de la lutte contre le réchauffement climatique...). C'est bien simple: le PS a fait tout le contraire. Il a replacé en position éligible une bonne partie des fainéants du Parlement, écartant certains des plus travailleurs (Gilles Savary, Marie-Ange Carlotti, entre autres) et offert un siège à d'illustres inconnus de la question européenne, très bien implantés dans l'appareil socialiste.

    La région Nord-Ouest est une caricature avec la première place accordée au premier secrétaire du PS du Nord (un proche d'Aubry) et la seconde à une élue de Seine-Maritime (le fief de Fabius). Il a dès lors fallu recaser deux sortants de cette région – pas des plus assidus à Bruxelles : Vincent Peillon dans le Sud-Est et Henri Weber, maintenu dans le Centre malgré un vote défavorable des militants.

    Chacun des barons a imposé ses proches à des places jouables : ainsi, Aurélie Fillipetti, proche de Ségolène Royal, est 3e dans l'Est alors même qu'elle est déjà députée à Paris (principe de précaution, semble-t-il, car la circonscription conquise par la jeune élue devrait disparaître); ainsi, François Hollande a t-il poussé deux de ses proches: Stéphane Le Foll, sortant mais très peu présent à Bruxelles (2e dans l'Ouest) et Frédérique Espagnac, son ancienne attachée de presse (4e dans le Sud-Ouest); ainsi, Arnaud Montebourg imposant un économiste de l'OMC, Mustapha Sadni (4e dans l'Est); ainsi, Harlem Désir, le fidèle lieutenant de Bertrand Delanoë (mais lui au moins a travaillé...). Parmi ces candidats, pas ou très peu de spécialistes des questions agricoles ou industrielles, de connaisseurs des réseaux européens, mais plutôt des « technos » proches d'un baron du PS.

    Comme me l'expliquait un député européen sortant et sorti, on ne peut pas participer au travail des commission à Bruxelles et aux réunions du bureau et secrétariat national du PS qui ont lieu toutes deux les mardi et mercredi. Ceux qui prennent à coeur leur mandat choisissent la première solution (au risque de ne pas être réinvestis) alors que ceux qui privilégient leur place dans l'appareil préfèrent sécher l'essentiel du travail en commission, obscur et peu visible. Voilà pourquoi, entre autres, le groupe socialiste français a tant de mal à faire valoir ses positions au sein du Parti socialiste européen (PSE)...

    Bien entendu, le faible score du PS pourrait également s'expliquer par la très forte concurrence politique, avec les listes écologistes (très intelligemment constituées), du MoDem, du Front de gauche et même du NPA. Ces quatre formations pourraient effectivement tirer parti des faiblesses structurelles du parti socialiste. Pour autant, s'il vous plaît, mes amis socialistes, ne nous refaites pas le coup de 2002, où les amis de Lionel Jospin nous avait expliqué que l'élimination de leur champion était de la faute des autres.