En cette époque de vœux, il est tentant de réfléchir à ce qu'on peut souhaiter de mieux pour la politique en 2014. Car constater qu'elle est en crise structurelle (et ce depuis au moins 2005, année du référendum sur l'Europe) est difficilement contestable.
2013 n'a pas arrangé les choses. Calamiteuse affaire Cahuzac, échec de Hollande à « inverser la courbe du chômage », bisbilles permanentes au sein de l'UMP (et maintenant autour des listes à Paris), contorsions de l'appareil Europe Écologie Les Verts pour rester au gouvernement malgré la nullité du bilan environnemental, sans oublier la médiocrité d'une partie des responsables (Harlem Désir en premier chef) et les attaques ad hominem de Mélenchon... n'en jetez plus !
Inlassablement et méthodiquement, les chefs politiques nationaux construisent le dégoût des citoyens vis-à-vis de la chose publique pour ensuite déplorer l'abstention et le repli individualiste...
En 2014, que souhaiter pour redorer le lustre de la politique ? Pas facile de répondre car on est tenté de dérouler le programme de l'utopie (un beau mot trop souvent dévoyé) sans connexion aucune avec l'état d'un pays engoncé dans le chômage massif et les inégalités les plus choquantes. Essayons donc de conjuguer le souhaitable et le possible !
1/ Faisons des élections des vrais scrutins politiques.
Les choses sont bien mal engagées. Aux européennes, les grands partis ont constitué des listes qui ressemblent plus à un aréopage de losers des élections nationales (Nadine Morano en étant la démonstration la plus caricaturale, mais pas unique) et d'apparatchiks en mal de mandat (les exemples sont nombreux au PS) que de militants européens en capacité d'influer le cours de l'Europe. Il est plus que probable que l'offre des pro-Européens étant de ce niveau (même si celle d'EELV est moins catastrophique), les tenants d'un recul de la construction européenne seront majoritaires dans le pays cofondateur de l'Europe. Espérons simplement que le débat du printemps sur les enjeux de ce scrutin ne va pas tenter d'exporter les clivages franco-français ! Peut-on également espérer que les médias français s'intéressent vraiment aux réalités de l'Europe des 28 et acceptent de quitter leurs lunettes hexagonales ?
Venons-en aux élections municipales de mars. Là aussi il serait bon d'élargir le regard. L'enjeu ne se situe pas seulement à Paris ou à Marseille. Même pas dans le nombre de prises de guerre du FN (même si cette question n'est pas anodine). Rappelons-le, il existe plus de 36 000 communes. La volonté de reconstruire du lien civique, de dépasser le chacun pour soi commence là, au premier niveau de la vie démocratique. Si ce scrutin ne permet pas un renouvellement des élus et l'émergence de nouvelles idées, comment espérer un sursaut démocratique ? Il faut bien dire que les obstacles à celui-ci sont nombreux.
Dans les grandes villes, la constitution des listes est monopolisée par les partis. Il ne s'agit pas de leur contester une légitimité, mais qui ne voit pas que ceux-ci (y compris à l'extrême gauche) représentent faiblement la diversité sociologique et que l'adhésion à un parti n'obéit pas qu'à des considérations nobles et désintéressées. Combien ont intégré une formation politique voici 2 à 3 ans dans l'espoir d'avoir une place en 2014 ? Il y aura sans doute un renouvellement des maires et adjoints lors de ce scrutin, mais il faudrait s'interroger sur leur parcours : combien d'anciens attachés parlementaires, de pseudos syndicalistes étudiants ou de permanents vont prendre d'importantes responsabilités tout simplement parce qu'ils ont été adoubés par leur mentor ?
Dans les petites et moyennes communes, le poids des partis se fait moins sentir, mais les notabilités sont souvent pesantes. Il n'est pas rare de voir un maire élu en 1971 (il y a plus de 40 ans), voire plus se représenter avec des chances non négligeables d'être réélu. Pour autant, les choses semblent évoluer ici ou là. Les élites qui « prennent le pouvoir » ont souvent des approches plus exigeantes en termes de démocratie. Elles raccrochent plus facilement après 2 ou 3 mandats, sont plus ouvertes à la contradiction voire la contestation, s'intéressent vraiment au développement durable et sont plus volontaires dans la démarche intercommunale. Gageons que ce mouvement de renouveau de la démocratie de base va s'amplifier avec ce renouvellement de 2014 !
2/ Changer la façon de gouverner !
Je ne connais pas l'audience des vœux de François Hollande, mais il est fort probable qu'elle a été particulièrement basse. La parole présidentielle, déjà affaiblie par Sarkozy, a un vrai problème de crédibilité. Quand un pouvoir n'arrive pas à reconnaître son échec dans la lutte contre le chômage (en noyant le poisson dans des considérations statistiques), les citoyens ne peuvent que s'en détourner. Un échec, ça peut arriver, ça peut s'expliquer, mais le nier ainsi revient à prendre le peuple pour un imbécile. Les conseillers de François Hollande semblent oublier que le niveau de formation des Français a grandement progressé en 2 ou 3 décennies. A les sous-estimer ou à leur mentir, on prend le risque de recevoir un gros boomerang électoral !
Dire la vérité, être courageux... voilà ce qui manque (entre autres) au pouvoir actuel. Si les deux conditions étaient réunies, celui-ci devrait s'interroger sur la politique actuelle. Les hypothèses étant fausses (la croissance va revenir !), les solutions proposées ne peuvent que nous emmener dans le mur. Et ce n'est pas l'éventuel remplacement du fade social-démocrate Jean-Marc Ayrault par l'orgueilleux « clémenciste » (admirateur de Clemenceau) Manuel Valls qui permettra de changer de cap.
Cette question de l'aveuglement de l’Élysée n'est pas nouvelle, et renvoie à la façon dont on désigne notre Président et les missions qu'on lui assigne. Notre vision monarchique du pouvoir (un homme seul peut tout) est non seulement ridicule (l'intelligence est une construction collective), mais dangereuse pour affronter les défis qui nous attendent. Ce n'est pas faire injure à François Hollande et à sa clique de conseillers que de dire qu'ils ne pourront pas seuls réinventer une France plus heureuse.
Le courage aujourd'hui serait de remettre en cause les principes de la Ve République. Ce qui était sans doute valable dans la France des 30 Glorieuses sortant difficilement de son aventure coloniale ne nous permet plus d'affronter les défis de la globalisation et d'un renversement de l'ordre mondial. Mais qui en 2014 aura le courage de s'attaquer à ce totem français, l'élection au suffrage universel du Président ?
che vis-à-vis de toutes les critiques, même venant de son camp, peut se retourner contre lui; son incapacité à laisser travailler l'équipe gouvernementale, sa tendance à court-circuiter les annonces ministérielles l'exposent à toutes les critiques (d'où son différentiel de popularité avec son Premier ministre). En outre, Nicolas Sarkozy va devoir prendre garde à la schizophrénie de sa politique: il donne des leçons de régulation et de moralisation du capitalisme au monde entier, y compris à Barack Obama, mais sa politique intérieure est loin d'être exemplaire à cet égard. Pourquoi s'obstiner à déréguler certains services publics? Pourquoi laisser se goinfrer les grands patrons, comme on l'a vu avec l'affaire Proglio (le nouveau patron d'EDF qui entend conserver son traitement de Veolia)? La question de la cohérence entre le « dire » et le « faire » est une nouvelle fois posée chez le Président. Si, comme c'est probable, les difficultés économiques et sociales s'aggravent en 2010, ce grand écart risque d'être de plus en plus insupportable.
Dans l'interview qu'a donnée Bertrand Delanoë au journal Le Monde (16 juin), une phrase a retenu mon attention. Non pas celle – relevée par certains journalistes – où il répond à la question « Avez-vous fait une croix sur vos ambitions au sein du PS? » par un « je n'ai fait une croix sur rien du tout ». Imagine-t-on qu'à cette question, le maire de Paris réponde tranquillement: « Oui, après mon échec à conquérir le PS à l'automne dernier, j'entends me consacrer entièrement à ma ville et après 2014, je prendrai ma retraite dans ma Tunisie natale et quitterai la politique »? Même s'il ne croit plus à son destin présidentiel – je n'en sais fichtrement rien -, il ne dira rien de définitif qui lui reviendrait ensuite comme une boomerang. Ne jamais injurier l'avenir, c'est une règle en politique qu'un jour d'avril 2002, Lionel Jospin, pris par un élan de sincérité et d'éthique démocratique, avait oublié. Il s'en est bien mordu les doigts ensuite.
lques jours, les euro-députés prendront leurs fonctions à Bruxelles et Strasbourg. Pour la France, ce sont 72 parlementaires désignés par 40 % du corps électoral (ne l'oublions jamais!). Nul besoin de rappeler les équilibres politiques avec un groupe UMP supérieur d'une unité au total PS + Europe écologie (EE), 29 élus pour le premier cas et deux fois 14 pour les seconds. On rajoutera les 6 députés MoDem, les 5 du Front de gauche, les 3 du FN et le dernier de Libertas, Philippe de Villiers. La liste devrait évoluer car Jean-François Kahn, tête de liste MoDem dans l'Est, a déjà annoncé qu'il céderait la place à la seconde de liste, députée sortante, alors que Brice Hortefeux, élu à la surprise générale dans le Centre, ne devrait pas suivre à Bruxelles ses collègues Michel Barnier et Rachida Dati, pour rester au gouvernement, ce qui permettra à une femme de siéger au Parlement européen.
s, le frontiste Jean-Marie Le Pen, 80 balais. Là aussi, des différences sont sensibles d'un groupe à l'autre : autour de la moyenne, l'UMP (54 ans); en-dessous, le PS (52 ans) et EE (50 ans); au-dessus, le MoDem et le Front de gauche (56 ans), le FN (60 ans). On remarquera que la tranche d'âge 20-30 ans est représentée par 2 élus (UMP, EE), celle des 30-40 ans par 5 députés (2 UMP, 1 PS, 2 EE) alors que celle des 60-70 l'est par 17 députés (11 UMP, 2 PS, 3 EE, 1 Libertas). Ce n'est bien sûr pas la raison principale, mais il est clair que de nombreux jeunes ont du mal à se sentir représentés, au niveau générationnel, par des élus qui ont très souvent l'âge d'être leurs parents voire leurs grands-parents.
ts -, il est difficile de les comptabiliser tellement ils sont nombreux.