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  • Le PS peut-il changer?

    P1000265.JPGLe scrutin de ce dimanche dans notre hexagone est assez clair. C'est la règle des 2/2. Deux gagnants et deux perdants. Un petite victoire pour l'UMP qui a surfé sur l'image très positive laissée par la présidence française de super-Sarkozy, et une grande victoire pour les listes Europe écologie emmenées par le toujours vert Daniel Cohn-Bendit.


    Ce succès (autour de 15 %) est liée, selon moi, à la combinaison réussie de trois facteurs: de bons candidats crédibles ancrés dans la société et ses mouvements (un ancien responsable de Greenpeace, un paysan anti-OGM, une ancienne députée spécialiste des déchets nucléaires, une ex-magistrate engagé contre la corruption...); une vraie campagne européenne qui a évacué l'enjeu qui obsède les politiques, 2012; une adéquation avec les préoccupations du moment: la crise de notre système de développement et la question du réchauffement climatique.

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    A l'inverse, les deux grands vaincus, le MoDem et le PS, n'ont pas réuni ces trois conditions. Le parti de François Bayrou a voulu faire un tour de chauffe avant la présidentielle, sabordant son capital de sympathie sur l'Europe. Le Béarnais a trop donné l'impression de multiplier les coups au lieu de construire une formation en faisant émerger des idées nouvelles (et pas seulement des attaques contre Sarkozy) et d'autres têtes que la sienne. Pour autant, le patron du MoDem est loin d'être enterré pour la présidentielle...


    Venons-en au PS. J'avais, dans une note du 23 mai intitulée « La grande frousse des socialistes », expliqué pourquoi tous les ingrédients étaient réunis pour que ce scrutin imperdable (le besoin de régulation, la crise de confiance envers le gouvernement Fillon) voit une nouvelle désillusion pour le PS. Tout à fait honnêtement, je ne pensais pas que le parti de Martine Aubry serait loin de la barre des 20%, qui était déjà considérée comme un minimum à atteindre. La gifle est terrible pour les socialistes qui se font doubler par les écolos largement dans deux régions: l'Ile-de-France (avec 12,8 %) et le Sud-Est (14,3 %) où le parachutage de Vincent Peillon, le Picardo-Parisien, s'est révélé - comme il fallait s'y attendre - catastrophique. Dans la région ultra-favorable à la gauche qu'est le Centre (comprenant le Limousin et l'Auvergne), le PS emmené par Henri Weber, parisien s'il en est, anciennement élu dans le Nord, fait un minable 17,8 %. Même dans l'Ouest où le PS espérait doubler l'UMP, il en est largement derrière.

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    Les raisons de ce vote-sanction sont nombreuses. Le choix des candidats était contestable, la proximité avec les barons (ou baronnes) étant souvent plus importante que le travail au Parlement européen. Quand on fouillait dans le CV des nouveaux candidats, on ne trouvait pas de paysan connaissant les réalités agricoles (le premier budget européen, tout de même), pas de militant associatif impliqué dans les réseaux européens, pas de responsable du syndicalisme ouvrier européen... On voyait surtout des professionnels de la politique, passant d'un mandat à l'autre (avec la situation caricaturale d'Aurélie Filipetti, députée française, voulant se prémunir contre une éventuelle défaite en 2012 en se faisant élire à Bruxelles) ou vivant dans l'ombre d'un leader et passant à leur compte. La situation d'extrême division, le souvenir encore vif du détestable congrès de Reims, la faiblesse du renouvellement du personnel ont joué évidemment un rôle dans l'éloignement des électeurs. Il est clair également qu'une partie des supporters de Ségolène Royal ont préféré donner une leçon à la direction de Martine Aubry qui n'a pas fait preuve de son sens de l'ouverture. Et puis surtout, on cherche en vain des idées vraiment nouvelles dans ce parti qui va d'échec en échec dans les scrutins nationaux.


    Alors le PS peut-il se relever de cette nouvelle désillusion? Bien entendu, les chefs nous font le coup classique: nous assumons, nous allons changer, la mue du parti va s'accélérer. Le problème, c'est que lorsqu'on connait ce parti de l'intérieur, on voit bien que les jeux internes, la préparation de 2012 rendent difficiles voire impossibles cette véritable rénovation. Tout le monde a intérêt à ne pas bouger au même moment; il ne faut pas prendre trop de risques car les régionales arrivent et puis tous ceux qui vivent grâce au PS et ses élus (les permanents, les attachés parlementaires, les divers cabinets, etc.) ont un poids finalement plus important que les dizaines de milliers de militants qui voudraient que ça bouge.


    Que va-t-il se passer? Beaucoup d'agitations, de petites phrases, peut-être une remise en cause de l'autorité de la première secrétaire) et puis, le ronron va reprendre car il faudra bien préparer la future échéance électorale et faire mine de se rassembler. Je ne vois pas quel responsable aura le courage de poser les questions qui fâchent, dans un esprit purement désintéressé (sans préparer pour lui ou son (sa) protégé(e) le scrutin d'après. J'espère me tromper.


    Que les responsables du PS se méfient tout de même. Aucune formation politique n'est assurée de demeurer au premier plan et d'avoir une influence autre que locale. Si le PS devient la SFIO de la fin des années 60, il mourra comme son devancier. Mais en ont-ils conscience?

  • Chacun cherche sa profession de foi

     

    La campagne officielle se termine dans quelques heures. Il ne reste plus que demain samedi pour que les indécis se déterminent sur leur vote et pour mobiliser la cohorte potentielle d'abstentionnistes.

    J'ai reçu voici deux jours les professions de foi des principales listes (certaines n'ont pas les moyens de les imprimer) pour la circonscription Ile-de-France (les différences d'une région à l'autre sont finalement assez faibles. Je me suis plongé dans cette littérature peu sexy, mais importante pour connaître ce que chacun a dans le ventre. Sans en faire un commentaire détaillé, voici mon analyse comparée.

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    Regardons le recto. Aucune profession de foi ne se ressemble, même si le format - imposé par la loi électorale - est le même. Visuellement, certaines listes ont fait le choix de tout miser sur un candidat, la tête de liste. C'est le cas pour Nicolas Dupont-Aignan sur fond mauve. Idem pour le Front national et pour la candidate du Centre national des indépendants et paysans (CNI), Annick du Roscoät avec ce curieux site de campagne « la droite rebelle ». Antoine Pinay, le leader du très droitier CNI, doit se retourner dans sa tombe! Le PS a pris la même option avec la tête rieuse d'Harlem Désir. Certains dans le parti ont regretté que le choix n'a pas été fait de présenter une équipe, notamment en valorisant le très médiatique Benoît Hamon.

    A l'inverse, d'autres listes mettent en avant le collectif : le NPA avec ses trois premiers de liste (dont Olivier Besancenot, 3e, qui est de taille plus réduite -sur la photo – que le premier Omar Slaouti); les Verts avec le duo à lunette Cohn-Bendit – Eva Joly (en plus petit les photos des 3e et 4e P1000266.JPGnettement plus jeunes) ; le Front de gauche avec une ribambelle de responsables (dont Marie-George Buffet qui n'est pas candidate) ou encore l'UMP avec la triplette gagnante (?) Barnier - Dati – Cavada. Les derniers ont fait un mixte: le MoDem met en avant sa tête de liste Marielle de Sarnez sous le patronage de François Bayrou qui, sur la photo, lève son bras comme pour indiquer une direction. Philippe de Villiers, le boss français de Libertas (listes financées par un milliardaire irlandais europhobe), fait un choix curieux en apparaissant en grand (alors qu'il est candidat dans l'Ouest) pour reléguer en haut à gauche la tête de liste Jérôme Rivière, ancien député de la Côte d'Azur.

    Le slogan ensuite. Le PS fait dans l'efficace quoique conventionnel « Changer l'Europe maintenant! »; l'UMP affiche un énigmatique « Quand l'Europe veut, l'Europe peut ». Cela ne vous rappelle pas le « Tout est possible » d'un certain Nicolas Sarkozy. A gauche, le Front P1000273.JPGde gauche a oublié de trouver un slogan, mais cite simplement les trois formations qui soutiennent ce Front: la Gauche unitaire (une ex-branche de feue la LCR), le Parti de gauche et le PCF. Ces trois-là ne se seraient-elles pas entendues sur le slogan? Le NPA assène son déjà connu leitmotiv « Partout en Europe, pas question de payer leur crise! » La liste conduite par « Dany » a fait le choix de ne pas mettre de slogan mais d'indiquer « 10 raisons de voter pour Europe Ecologie ».

    A droite, Dupont-Aignan propose une longue diatribe contre « PS, UMP, MoDem et Verts » qui « depuis 20 ans, ils ont signé ou soutenu tous les traités européens ». Lui propose de « défendre depuis toujours une France libre et une Europe différente, une Europe utile. » La candidate du CNI invite à « voter pour une Europe utile », sommet de l'originalité. De Villiers veut tout simplement « protéger nos emplois et défendre nos valeurs ». Mais quelles valeurs: est-il sûr que les Français partagent ses valeurs, lui qui est partisan des expulsions massives de sans-papiers et de la peine de mort? Le FN a le mérite de la clarté avec un slogan tout en nuances: « Contre l'arnaque européenne ».

    Tournons maintenant la page de la profession de foi. C'est là où figure (rarement) la composition de la liste et surtout les principaux engagements et propositions de la liste. Les contenus et tonalités sont très différents. Il y a ceux qui remplissent tout l'espace avec un texte dense. C'est le cas de l'extrême gauche. Lutte ouvrière avec un très long texte sur une page deux tiers commençant par un « Travailleuses, travailleurs, salariés, électeurs des classes populaires » (les autres n'existent pas). Le NPA propose un laïus un peu moins indigeste dans lequel se dégagent quatre slogans: « Une Europe sociale: nos vies, pas leurs profits »: « Une Europe par et pour les peuples »; « Pour une révolution écologique »; « Pour une Europe solidaire des peuples du monde ».

    Dans une lettre signée par Cohn-Bendit, Joly et José Bové (candidat dans le Sud-Ouest), la liste Europe Ecologie insiste sur l'urgence écologique et ses conséquences pratiques (« Nous sommes convaincus qu'il faut changer nos manières de produire, de P1000275.JPGconsommer, de vivre et de travailler ») ainsi que les exigences éthiques de la politique (« vous élirez des député-e-s qui se consacreront uniquement à leur mandat européen »).

    Le MoDem est sans doute le plus précis avec 27 engagements. Entre autres, « défendre les services publics pour préserver notre cohésion nationale », « créer une avant-garde européenne formée à partir des pays de la zone euro » ou encorP1000278.JPGe « assurer la sécurité en Europe à travers la création d'un procureur de l'Union […] pour lutter contre la criminalité organisée ».

    L'UMP est plus vague avec six directions. « Refuser l'adhésion de la Turquie » est curieusement le premier des points alors que la question ne devrait pas être d'actualité sous le mandat 2009-2014. La question sécuritaire est très fortement présente avec ce point: « soutenir une politique de lutte résolue contre l'immigration clandestine. Nous refuserons les régularisations massives d'immigrés clandestins ». Comme si cela était de la compétence de l'Union. Cette tonalité anti-Turquie la rapproche des listes Libertas dont le premier point est « Pour une Europe des Nations, vraiment européenne, sans la Turquie ». Pour le reste, l'UMP reste relativement vague: que veut dire exactement « défendre le capitalisme des entrepreneurs contre le capitalisme des spéculateurs »? Comment « soutenir la mise en place d'une véritable politique industrielle européenne »? On demandera à Mme Dati des lumières sur ces questions...

    Le PS P1000274.JPGpropose également six engagements qui auraient gagné à être explicités. C'est quoi un « Pacte européen de progrès social »? Quelles règles le PS entend-il « imposer au capitalisme financier »? « La politique agricole commune plus ambitieuse et plus juste » que le PS appelle de ses voeux, comment se traduirait-elle? Le PS préfère manifestement cogner sur « l'Europe libérale de la majorité sortante, celle de Nicolas !sarkozy, Silvio Berlusconi, José Manuel Barroso » (pourquoi ne pas citer Angela Merkel? Parce qu'elle gouverne avec le SPD?) que de détailler son programme pour « changer l'Europe ». Certains y verront un aveu de défaite: les rapports de force en Europe n'étant pas en faveur de la gauche, le PS veut-il plus taper sur la droite que construire une alternative?

    Le Front de gauche, de son côté, axe toute sa campagne contre le Traité de Lisbonne « adopté main dans la main par la droite et les socialistes européens qui gouvernent ensemble les institutions européennes ». Le Front de gauche fait une dizaine de propositions parmi lesquelles un « Smic européen égal à 60 % du salaire moyen dans chaque pays » ou un « pôle public bancaire ». Le propos est souvent assez vague, s'inscrivant davantage dans un cadre français qu'européen. Quant aux listes Debout la République de M. Dupont-Aignan, elles proposent tout simplement de « supprimer la Commission de Bruxelles » et de la « remplacer par « des agences de coopération thème par thème comme l'agence spatiale européenne qui a réussi la fusée Ariane ». Supprimer la Commission? Voilà au moins un débat qui aurait permis à la campagne de... décoller.

  • Européennes: quand ça veut pas...

    UMP.jpgEvènement juste avant le long pont du 8 mai et 48 heures avant le meeting commun Merkel-Sarkozy. Le principal parti français, l'UMP, a communiqué la composition de ses listes pour les élections européennes de début juin. Le parti de notre hyper-Président n'est pas tout à fait seul puisqu'il est associé à trois « partis frères »: le Nouveau centre (vous savez, ceux qui ont quitté le navire Bayrou pour aller à la soupe gouvernementale), la Gauche moderne (l'oeuvre de Jean-Marie Bockel, ministre débarqué de la Coopération transféré aux Anciens combattants – le « moderne » associé aux « Anciens combattants », il fallait y penser...) et les Progressistes (patronnés par l'expulseur-en-chef, notre ami Eric Besson).

    Evènement, écrivais-je, car toutes les autres formations politiques, y compris les allumés-anti-sionistes-cache-sexe-de-l'antisémitisme conduits par « l'humoriste » Dieudonné, avaient déjà communiqué, souvent depuis plusieurs semaines, la composition de leurs listes. Alors pourquoi cela a tant traîné dans le parti hyper-présidentiel? Serait-il mal organisé? Serait-ce parce que les partenaires s'affrontaient durement sur le type d'Europe à proposer aux Français? Se disputaient-ils pour savoir s'il fallait maintenir à son poste de patron de la Commission le sémillant Barroso? Non, vous n'y êtes pas, les choses sont beaucoup plus sérieuses. Le retard impressionnant pris pour publier la composition des listes « Quand l'Europe veut, l'Europe peut » (c'est leur nom) était lié aux interminables arbitrages entre le géant UMP et les groupuscules majorité présidentielle et surtout avec l'Elysée qui, comme d'hab', voulait tout contrôler. Le « pôvre » Jean-Claude Gaudin, qui présidait cette interminable commission d'investiture, s'est arraché ses derniers cheveux, avant d'aboutir à ce résultat.

    Certes, l'identité des deux premiers candidats des listes présentées dans les sept grandes circonscriptions était connue depuis fin janvier. Avec par exemple, le duo de choc francilien Barnier-Dati... En gros, la bagarre portait sur le nom du troisième, voire du quatrième, de la liste, tous deux en bonne position pour être envoyé au Parlement européen. Avec la parité, les choses sont simples, du moins apparemment : si les deux premiers sont un homme puis une femme, un homme sera au 3e rang et une femme au 4e (et inversement si une femme conduit la liste, ce qui ne se produit que pour deux des sept circonscriptions dans le Sud-Est et en Outre-Mer).

    Des hommes qui se piquent d'Europe dans la majorité présidentielle, cela ne manque pas. Les bagarres ont été féroces pour la troisième place stratégique, chacun des ténors poussant son protégé. Après, allez savoir sur quels critères ont été choisi tel(le) ou tel(le) pour la troisième place ? Pourquoi « Arnaud Danjean (Saône-et-Loire) » (il est présenté ainsi, sans autre titre, dans le communiqué de presse) se retrouve troisième sur la liste Grand-Est alors que « Benjamin Delevey (Marne), conseiller municipal de Reims » est cinquième, donc non éligible? Le sieur Danjean est-il plus méritant, connaît-il mieux les rouages européens que le sieur Delevey? Serait-ce parce que la région du premier (la Bourgogne) pèse électoralement plus que celle du second (Champagne-Ardennes)? Mystères et boule de gomme.

    Mystère également que la présence en quatrième rang en Ile-de-France - une place éligible si l'UMP fait un score honorable - de Marielle Gallo, proposée par Gauche moderne, le groupuscule de Bockel (vous savez celui que Sarko a envoyé en pénitence aux Anciens combattants après avoir été un peu trop combattant sur la Françafrique). Mme Gallo est la femme de M. Gallo (jusque-là tout est normal), l'un des romanciers les plus prolixe sur la place de Paris, ex-mitterrandiste, ex-chevènementiste, toujours sarkozyste. On aimerait savoir si celle qui figure sur la liste conduite par le très europhile Michel Barnier partage les convictions très eurosceptiques de son mari (à moins qu'il ait changé d'avis depuis). Evidemment, on se gardera bien de faire un rapprochement entre le ralliement de monsieur au panache de notre petit Bonaparte et la bonne place accordée à madame. Ce ne serait qu'insinuations gratuites...

    On évitera également de se demander pourquoi le sortant reconnu pour sa compétence, Alain Lamassoure, se retrouve troisième dans la région Sud-Ouest – à une place très incertaine – alors que Dominique Baudis, ex-présentateur de JT, ex-député-maire de Toulouse, ex-président du CSA, actuel président de l'Institut du monde arabe, est tête de liste? Le premier serait-il trop compétent, pas assez « glamour », pas assez soutenu par le Château (l'Elysée)? Le second s'est-il découvert une passion soudaine pour la construction européenne ou rêve-t-il d'un retour sur la scène politique française? On se perd en conjectures et on se dit qu'à tout bien peser, les voies du Seigneur sont moins impénétrables que celles de « Quand l'Europe veut, l'Europe peut ».

    PS: La composition des listes ayant donné lieu à d'autres curiosités sur l'autre rive, côté socialistes, nous y reviendrons dans un prochain post.