Il règne une drôle d'ambiance dans ce pays. Quand je dis « drôle », je devrais plutôt dire bizarre ou écœurante. Sur le plan politique, le pouvoir remet chaque semaine une louche de rigueur alors qu'il jurait, au moment des régionales, qu'il n'y aurait pas de plan de réduction des dépenses. Personne ne le croyait alors, mais pourquoi ne faudrait-il plus croire la parole des autorités? D'ailleurs, à quoi bon appeler « autorités » des instances qui n'ont plus aucune crédibilité? Ces derniers jours, on a même vu le pouvoir s'interroger sur la réalité de l'augment
ation des rémunérations des fonctionnaires prévue ce 1er juillet. Juste avant les vacances, il faut le faire! Et puis, on a pu lire dans un journal anglais que le secrétaire général de l'Elysée promettait pour l'automne de nouvelles coupes dans les budgets publics. Qui est-il, ce Monsieur Guéant, l'homme des basses œuvres sarkozystes et des relations aussi étroites que nauséabondes avec quelques dictateurs africains (qui ont eu la peau de Jean-Marie Bockel à la Coopération), pour faire ce type d'annonce? N'existe-t-il pas dans ce pays un Premier ministre et un ministre de l'Economie et des Finances? Pourquoi un tel mépris pour les autorités légitimes? A ce compte-là, puisqu'il faut faire des économies, pourquoi ne pas supprimer, après la Garden Party de l'Elysée, Matignon et quelques autres ministères?
Parlons-en, d'ailleurs, des maroquins ministériels. Certains d'entre eux,
sans doute peu harassés de travail, se comportent comme des gougnafiers. Prenons l'exemple de Christian Blanc qui s'est fait pincer par Le Canard enchaîné avec une facture de 12000 euros de cigares pris en charge par le Trésor public. 12000 euros, Monsieur Blanc, c'est à peu près ce que gagne un Smicard sur une année! Ils sont des millions à se contenter de ce que vous fumez en une année... Le comble dans l'affaire, c'est que notre fumeur de havanes aux frais de la princesse désargentée, non seulement ne présente pas sa démission (ce qui se passe fréquemment chez nos voisins, et pour des sommes souvent moindres), mais qu'il charge un ancien de ses collaborateurs coupable, selon lui, de la fuite vers la presse.
Cela rappelle furieusement la situation du week-end dans l'équipe de France de foot où les joueurs firent la grève d'un entraînement, non pour dénoncer les propos inqualifiables d'un de ses membres en direction du sélectionneur (certes médiocre, mais ce n'est tout de même pas lui qui est en charge de marquer des buts), mais pour le soutenir ou faire semblant. La seule obsession de cette clique de bras cassés aux salaires ahurissants était de savoir qui avait révélé les propos de ce joueur particulièrement mal élevé qui avait conduit à son exclusion. Dans ce pays, ce qui est grave n'est pas d'avoir des pratiques illégales ou des paroles injurieuses, mais de révéler des faits. Le comble est que le Premier des Français reçoive, dès sa sortie d'avion, l'un des joueurs de cette
pitoyable équipe - par ailleurs remplaçant de luxe d'un prestigieux club espagnol - qui, à en croire la presse, serait l'un des meneurs de la grève de l'entraînement. Que cette rencontre ait lieu le jour d'une grande grève nationale (grève signifie perte de salaire pour ceux qui ne sont pas milliardaires du foot) ne semble pas choquer le Château.
La dimension affaire d'Etat prise par l'élimination de l'équipe de France, le choix d'un interlocuteur discutable (est-ce le responsable de la main qualificative des Bleus, le meneur de la fronde, le plus « capé » des Bleus qui est reçu?) par « l'autorité » publique qui prétend s'immiscer dans les affaires internes d'une fédération sportive pourtant autonome dans sa gestion, le mépris affiché en direction de centaines de milliers de citoyens qui craignent pour leur retraite... tout cela donne le vertige ou la nausée. On aimerait que quelques consciences nationales ou quelques éditorialistes courageux s'élèvent contre l'indignité nationale de cette nouvelle religion d'Etat qui en arrive à éclipser tout le reste. Ce 24 juin, par exemple, l'Elysée a annulé une rencontre avec des ONG pour parler du G20 et de la situation des pays pauvres... Sans importance tout cela au regard de l'avenir du coq français!
Cerise sur le gâteau, pourrait-on dire, on apprenait ces jours-ci le limogeage sans trop d'égards de deux humoristes qui intervenaient le matin sur France Inter. On peut aimer ou non leur humour (moi, j'aimais plutôt et je ne suis pas prêt d'oublier
le sketch hilarant de Stéphane Guillon sur la venue de DSK), mais on ne peut que s'inquiéter des choix idéologiques des patrons du service public de la radio. Trouver scandaleux tel ou tel sketch, c'est par définition refuser le statut d'humoriste qui forcément franchit régulièrement la ligne jaune érigée par les censeurs. S'il ne provoquait pas la réaction des « grands » ou supposés tels de ce monde médiatique, il raterait son objectif. S'il n'était plus un poil à gratter, parfois mal élevé, inconvenant ou grossier, il ne serait plus digne du nom de bouffon.
Dans un
livre écrit voici près de deux ans, François Léotard prophétisait un « ça va mal finir », en décryptant l'évolution du régime politique incarné par Nicolas Sarkozy pour lequel il avait voté. Celui qui n'avait pas toujours été un politique bien inspiré (souvenons-nous de la privatisation de TF1) trouvait des mots justes pour décrire cette dégradation générale du climat, cette banalisation de tout (de la fonction présidentielle, de l'honneur, du rapport éthique avec les deniers publics...). Il annonçait le règne des fausses valeurs et de la médiocrité ambiante. Nous y voilà donc. Et si l'on ajoute les conséquences d'une grave crise économique – dont les plus faibles vont payer le plus lourd tribut -, il faut vraiment s'inquiéter de la situation française. Sans vouloir jouer aux oiseaux de mauvais augure, rappelons tout de même que les fascismes européens sont toujours nés de la conjonction d'une décadence morale des « autorités », d'un sentiment d'humiliation nationale et d'une paupérisation des couches laborieuses. En tout cas, dans ce marais nauséabond, il est une responsable politique qui doit se frotter les mains. Elle porte le patronyme de Le Pen et le prénom de Marine...
nocent, rappelant la mode des pique-nique géants initiés à partir de Facebook, se cachait une manœuvre conjointe des courants les plus anti-musulmans de notre pays, à savoir les ultra-laïcards, étiquetés à gauche, pour lesquels toute manifestation de la religion mine les fondements de la République, et les « identitaires », placés à l'extrême droite, pour qui la France doit rester blanche et conserver son vieux fond judéo-chrétien (quoique judéo, ils n'aiment pas trop), mâtiné de paganisme. Que ces deux courants, apparemment opposés, se rejoignent pour une initiative excluant tous ceux qui ne mangent pas de porc (les musulmans et... les juifs) en dit long sur l'état de désorientation idéologique de notre pays. Comment est-il possible que les défenseurs des droits de l'individu, se réclamant du féminisme, puissent cohabiter avec les tenants d'un nationalisme forcené qui fleure bon la haine de toutes les institutions (il faut se rappeler que la personne qui avait attenté à la vie du président Chirac se réclamait de ce courant)?
mptes à railler la misogynie - parfois réelle - des leaders musulmans, sont-elles prêtes à partir en guerre contre les conditions de vie carrément misérables de ces femmes sans visage? Pour une Florence Aubenas, prenant la peine de s'arrêter pendant plusieurs mois pour vivre ce quotidien, combien de Caroline Fourest (ça y'est, j'ai donné des noms...) écrivant des éditos enflammés et des livres approximatifs, donnant des leçons à la terre entière sans franchir le périph' parisien?
placé pour lui ravir la place. Une enquête de CSA pour LCP indique, le 4 juin, que DSK gagnerait largement la primaire socialiste avec 33% des suffrages contre 12% à Aubry et 10% à Royal. Notons que ce sondage concerne l'ensemble des Français et non les adhérents et sympathisants socialistes, seuls appelés à s'exprimer. Or, on sait que le directeur général du FMI a une bonne cote parmi les électeurs de droite, ce qui remonte mécaniquement son score.
peuple français. D'ici là, Nicolas Sarkozy aura enfourché une nouvelle marotte, trouvé deux ou trois idées géniales pour faire meilleure figure. Et puis, la situation sociale mauvaise, voire calamiteuse, sera mise sur le dos de la crise internationale, donc attribuée à DSK. N'est ce pas Sarko qui a fait des pieds et des mains pour que l'ancien ministre de Jospin y soit nommé?
ntervention publique à Paris et de la dérégulation à New-York. Par ailleurs, celle-ci créerait des tensions fortes avec l'appareil socialiste comme on en a connu déjà en 2007. Comment croire, en effet, que l'ancien DG du FMI défende le retour de la retraite à 60 ans ou la forte taxation des dividendes et autres jeux spéculatifs qui seront au programme du PS. Ce n'est pas faire injure à DSK que de rappeler qu'il a plus d'entrées et d'amitiés dans les milieux patronaux que chez les camarades de la CGT. Ce n'est pas criminel, cela ne mérite pas le peloton d'exécution, mais cela augure mal de la nécessité d'avoir des dirigeants moins liés aux grands intérêts.