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jean-paul huchon

  • Gauche: Les anti-corruption sacrifiés

    A trois jours du second tour, le suspense est loin d'être insoutenable. A part l'Alsace où subsiste une réelle incertitude, les autres régions métropolitaines devraient être emportées sans trop de problème par la nouvelle gauche rose-verte-rouge. A part la Bretagne (où le socialiste Le Drian, largement en tête, a boudé Europe écologie) et le Limousin (où la majorité socialiste ne voulait pas intégrer la liste Front de gauche qui comprenait un mouton noir de NPA), il n'y aura dans chacune des régions qu'une liste se réclamant de la gauche. Et tout le monde de se préparer au partage des vice-présidences et des compétences afférentes.

    Tout va donc bien dans le meilleur des mondes de la gauche? Pas si sûr car les négociations d'entre deux-tours ont résTessier.jpgervé quelques surprises dans la composition des listes. Certains candidats d'ouverture présentés par Europe écologie (EE) ont été sacrifiés dans l'affaire. C'est notamment le cas de Séverine Tessier (photo), co-fondatrice et porte-parole de l'association Anticor qui lutte avec abnégation contre toutes les formes de corruption dans l'action politique. Elle qui était 4e sur la liste EE en Seine-Saint-Denis (et avait été plusieurs fois citée dans des interviews de Cécile Duflot) se retrouve en 20e place (inéligible) sur celle de Huchon. Dans l'Essonne, Jean-Luc Touly, qui dénonce inlassablement les méthodes des multinationales de l'eau pour obtenir des marchés publics, passe de la 3e place sur la liste EE à la 11e (éligible de justesse) sur la liste Huchon. D'autres candidats membres d'Anticor ont carrément été éjectés de la liste ou placés en position non-éligible. Cette situation n'est pas propre à l'Ile-Picard.jpgde-France: en PACA, le candidat PRG Jean-Christophe Picard (photo), membre de l'association, disparaît entre les deux tours de la liste Vauzelle dont il était membre dans les Alpes-Maritime. « Michel Vauzelle a décidé de de piller les places des Alpes-Maritimes pour y caser des candidats habitant dans d'autres départements », a-t-il accusé dans la presse locale.

    L'association Anticor a réagi le 18 mars dans un communiqué: « Après un premier tour encourageant, ces candidats « qui dérangent » ont fait les frais des accords passés pour le second tour et se trouvent en position non éligibles ou charnière. En outre, aucune des propositions issues de la charte éthique Anticor pourtant signée par des têtes de listes et des candidats n'a été reprise (formation obligatoire des élus, non cumul des fonctions, prévention des conflits d'intérêt..).»

     

     
    Il semble donc que les appareils qui composent les listes à l'abri du regard des militants - avec les deux négociateurs-choc, Claude Bartolone pour le PS et Jean-Vincent Placé pour les Verts - ont privilégié, pour ce second tour, les candidats estampillés socialistes ou écologistes. Il y a bien quelques exceptions : Pierre Larrouturou, ex-PS passé à Europe écologie, se retrouve tête de liste Huchon dans les Hauts-de-Seine.

    Comment expliquer cette méfiance du PS francilien à l'égard des militants anti-corruption? Dans la région, Jean-Paul Huchon a été la seule tête de liste à ne pas répondre à un questionnaire de Transparency International sur la corruption. Il faut dire qu'une question concernait la possibilité pour un candidat condamné de se représenter. L'actuel - et probable futur – président de l'Ile-de-France avait été condamné en 2008 à 6 mois de prison avec sursis et 60 000 euros d'amende après que la région a confié trois contrats de communication à une société où trHuchon et sa femme.jpgavaillait sa femme (photo de M. et Mme Huchon). A cette époque, Anticor avait estimé que « Jean-Paul Huchon ne devrait plus pouvoir se présenter devant les électeurs. » Deux ans après, le président sortant (qui a obtenu l'un des scores les plus médiocres pour un sortant au premier tour) peut prendre sa revanche. La vengeance est un plat qui se mange froid. Et tant pis pour la promesse de rénovation et d'ouverture de la vie régionale à des militants associatifs. Finalement, au vu du « remarquable » taux de participation, ce n'est pas la peine de remotiver le corps électoral...

  • Solférino, les apparatchiks et les féodaux

    Solférino a-t-il encore de l'autorité sur le parti socialiste? La question de l'influence de la direction nationale du PS se pose sérieusement au vu des derniers soubresauts de la préparation des régionales de mars prochain. Le 12 décembre dernier, le parti réunissait en grandes pompes ses têtes de liste à Tours pour le lancement de la campagne. Il fallait donner l'impression d'un PS uni et rassemblé, alors que la réalité est un peu différente. Les présidents de région n'ont pas besoin du parti pour faire campagne et conserver - éventuellement - leur siège. Malgré les grandes déclarations de principe, chacun mène son affaire comme il l'entend: chacun, son style; chacun, ses alliés (avec ou sans le MoDem); chacun, ses priorités.

    L'épisode du Languedoc-Roussillon en dit long sur l'affaiblissement de l'échelon central par rapport aux féodalités locales. Les choses étaient pgeorge frêche.jpgourtant entendues sur le papier: il n'était pas question d'investir le président sortant, le fantasque George Frêche, exclu du PS à la suite de propos racistes, notamment sur les harkis. Dans l'esprit de Solférino, le septuagénaire, passablement fatigué, devait laisser la place à la relève socialiste. Sauf que l'appareil local entièrement contrôlé par les proches du président sortant a tout fait pour remettre en selle le mal-nommé Frêche.

    La candidature anti-Frêche conduite par Eric Andrieu, patron socialiste de l'Aude, a été écartée par les militants qui ont préféré un homme de paille du président sortant qui avait annoncé, avant le scrutin interne, qu'il s'effacerait au profit de son mentor. La ficelle était grosse, déloyale, mais elle est passée dans cette région où les pratiques clientélistes ne sont pas un vain mot. Et l'appareil socialiste s'est incliné devant cette magouille interne, au nom du respect du vote des militants, en l'absence d'alternative à la candidature Frêche. Après cela, il sera difficile pour les leaders du parti socialiste d'ironiser sur les saillies racistes de Brice Hortefeux ou consorts.

    Le feuilleton Julien Dray - qui connaît son épisode semble-t-il ultime, comme par hasard juste après l'investiture des listes PS - complique également sérieusement la donne pour la direction nationale. Officiellement, tout le monde se félicite de voir le député de l'Essonne non renvoyé en correctionnelle pour des transferts d'argent douteux en provenance d'associations « amies ». En réalité, la situation est très embarrassante pour Solférino qui n'avait pas caché son souhait de ne pas voir Dray concourir pour les régionales. Les mêmes qui justifiaient l'éviction préventive d'un homme jugé encombrant (voir ma précédente note « Dray, ou comment s'en débarrasser ») affirment aujourd'hui qu'il est tout à fait légitime à la tête de la liste socialiste de l'Essonne. Comprenne qui pourra!

    Il n'en reste pas moins que la tête de liste Dray ne va pas de soi. Oublions provisoirement la question du cumul des mandats - on s'est très vite assis sur la volonté des militants d'y mettre fin. Intéressons-nous à ce que dit la justice. Julien Dray, certes, ne sera pas traduit en justice mais le procureur général de Paris le rappelle à la loi pour ses pratiques douteuses. On dit, par ailleurs, que la Cour des comptes veut mettre son nez dans le système Dray. Est-il raisonnable d'investir un homme aussi controversé alors que la demande d'éthique en politHuchon.jpgique et de rapports assainis avec l'argent est de plus en plus pressante dans la société? Europe écologie qui dispute en Ile-de-France la première place au PS et le parti de gauche de l'ex-copain à « Juju », Jean-Luc Mélenchon, vont faire leur beurre de ses (petites) entorses avec la morale politique (d'autant que le président sortant, Jean-Paul Huchon, a été condamné voici un an à du sursis dans une affaire de prise illégale d'intérêts).

    La campagne va être difficile pour Huchon, d'autant que six conseillers régionaux sortants PS, non réinvestis par le PS, ont claqué la porte pour leur parti, certains annonçant rejoindre les concurrents de gauche. Une défaite dans la région capitale serait un sérieux avertissement pour Solférino. Un de plus, serions-nous tenté d'écrire.

  • Dray ou comment s'en débarrasser?

    Alors que les militants écologistes de Greenpeace ont essayé (maladroitement ?) d’animer le débat sur le climat à quelques jours du sommet de Copenhague, le microcosme socialiste est agité par une question : faut-il accueillir sur les listes pour les régionales Julien Dray ? CoJulien Dray.jpgmme on le sait, le conseil fédéral de l’Essonne a rejeté sa candidature, en se donnant la possibilité de le réintégrer au cas où il serait « blanchi » par la justice. Le malaise vient du fait que le député et vice-président de la région Ile-de-France n’a pas été jugé (donc pas condamné), ni mis en examen suite à l’enquête préliminaire qui le concerne dans des affaires financières. Le malaise s’accroît quand on sait que le président sortant de la région, Jean-Paul Huchon, condamné en novembre 2008 à six mois avec sursis pour prise illégale d’intérêts (son épouse avait bénéficié d’un emploi fictif), a été autorisé par ses camarades à conduire la liste dans les Yvelines et à postuler à sa propre succession. Deux poids - deux mesures ?

     

    Si l’affaire Dray suscite autant de passions, c’est que le bonhomme symbolise une certaine époque. Venu de l’extrême gauche (LCR), il est à l’origine de la création de SOS-Racisme dont il a sélectionné et coaché la plupart des dirigeants. Il a entretenu des relations très nourries avec l’Elysée – qui a financé l’organisation anti-raciste – et œuvré à la réélection de François Mitterrand. Il n’a jamais pris ses distances avec les errements du second mandat du président dit socialiste (tout en étant l’un des artisans de la Gauche socialiste). Cette période a été marquée par des transferts d’argent douteux, une instrumentalisation du Front national et un train de vie ostentatoire (rappelons-nous du « gang des R25 »). Tout cela, Julien Dray, l’ancien révolutionnaire, l’a incarné jusqu’à la caricature. C’est peut-être cela que souhaite solder la direction du PS (Martine Aubry et son lieutenant de l’Essonne, François Lamy) qui trouve le symbole Dray bien encombrant…

     

    Car le député – vice-président du conseil régional incarne tout ce qui a fait tant de mal au PS. Julien Dray, comme on le sait, a un goût prononcé pour le luxe (il collectionne les montres qu’aucun Smicard ne peut se payer), pour l’intrigue politique (il a été activement courtisé par Nicolas Sarkozy – à moins que ce soit l’inverse) et pour les petites phrases assassines. C’est un orfèvre des coups tordus au sein du parti et il paraît étonnant qu’il s’étonne que tous ses camarades n’aient pas mouillé la chemise pour le défendre.

     

    Pour autant, se débarrasser d’un symbole peut s’avérer dangereux politiquement (les réseaux Dray vont s’activer pour trouver une riposte) et surtout ne règle pas les questions de fond. Comment séparer plus nettement l’exercice de la politique et l’accumulation d’argent ? Comment prétendre représenter des couches populaires paupérisées si on vit avec les revenus d’un cadre supérieur sans avoir connu d’ailleurs les vicissitudes de la vie d’une entreprise ? De nombreux Dray’s boys and girls (les anciens dirigeants de SOS-Racisme) sont passés directement du syndicalisme étudiant (qui n’est pas exempt de bizarreries financières) à la politique active, via souvent des cabinets politiques ou des agences de communication. Leur élévation sociale, l’accroissement considérable de leur niveau de vie sont liés à l’exercice de leurs fonctions politiques. Perdre un mandat pour Julien Dray (qui reste député) est insupportable du point de vue politique mais aussi sur un simple critère financier. Sauf à perdre toute crédibilité auprès de populations déjà sceptiques, la politique ne peut/ne doit être une rente de situation. En sanctionnant le « malheureux Juju », la direction du PS entend-elle prévilégier ce message ?