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Parti socialiste - Page 4

  • Gauche / paysans : le désamour est-il éternel ?

    A l'occasion du Salon de l'agriculture, tous les prétendants à l'Elysée ont fait le détour par la porte de Versailles. françois hollande,nicolas sarkozy,paysans,fnsea,confédération paysanneEt certains, à l'image de François Hollande, s'y sont particulièrement attardés avec un marathon de près de 12 heures. On ne discutera pas de l'amour, sans doute immodéré, des belles aquitaines ou des rondes normandes que peut avoir l'actuel président de la très rurale Corrèze. On notera simplement que le candidat socialiste présente un retard considérable dans la population agricole en termes d'intentions de vote, ceci expliquant sans doute cela.

    Selon un récent sondage, il serait crédité de 14 % alors que le président-candidat culminerait à 40 %. Fait exceptionnel : Hollande est doublé sur cet électorat par Marine Le Pen et François Bayrou. Les socialistes se rassurent - comme ils peuvent – en notant que ces 14 % représentent un doublement par rapport à 2007 où Ségolène Royal n'avait obtenu que 7 % des suffrages des agriculteurs. On pourrait penser que les faibles résultats de la présidence Sarkozy – au cours de laquelle le revenu de certaines catégories, notamment en fruits et légumes, a dégrigolé – pouvait profiter à un candidat socialiste qui marche régulièrement sur les pas de son devancier corrézien, Jacques Chirac. Eh bien non !


    Plusieurs types d'explication peuvent être avancées pour interpréter ce désamour persistant. Historiquement, la gauche a été portée par des forces urbaines, professeurs des villes, ouvriers des grands centres industriels ; les campagnes étant majoritairement acquises à des forces plutôt conservatrices et cléricales. De plus, la domination pendant des lustres des thèses marxisantes, avec la logique de collectivisation des terres, a été un épouvantail pour des campagnes, même dans les contrées radicales-socialistes, attachées à la petite propriété familiale. Pourtant, divers acquis pour l'émancipation paysanne, comme le statut du fermage – pour en finir avec l'archaïque métayage – ou les offices fonciers, ont été portés par des gouvernements de gauche (1936, 1945). Mais la gauche n'a pas su capitaliser sur ses avancées. Elle doit tenter d'en comprendre les raisons si elle veut conquérir une partie des agriculteurs.

    Elle doit proposer une lecture fine de cette catégorie qui ne représente plus que 3 % de la population active. Celle-ci est à la fois très disparate (en termes d'activité, de type d'exploitation et surtout de revenus) et très soudée. Dans un contexte où les terres agricoles continuent à être grignotées par la voirie et la ville (grave erreur écologique !) et où la logique de compétition mondiale fragilise les solidarités et la politique agricole commune, les agriculteurs ont tendance à faire corps face à l'adversité. C'est la raison pour laquelle un syndicat aussi contesté - et contestable – que la FNSEA résiste assez bien aux coup de butoir de la Confédération paysanne (gauche écolo) et la Coordination rurale (droite poujadiste).

    La gauche est trop souvent arrivée au pouvoir avec une forme de morgue, un mélange de technocratisme et de mépris pour cette culture paysanne dite archaïque et droitière. A y regarder de près, les campagnes sont pourtant porteuses, depuis une vingtaine d'années, de stratégies innovantes (accueil à la ferme, ventes directes, animations culturelles, nouvelles productions, agriculture bio) qui ont permis de limiter la casse et de maintenir de nombreux exploitants. Sans cela, la France compterait 1 ou 2 % d'agriculteurs sur des domaines de 100 à 200 hectares.

    Derrière un vernis de traditions inébranlables (que les urbains, éternels nostalgiques d'une campagne mythifiée, adorent, comme en témoigne notamment le succès du Salon de l'agriculture), ce sont des espaces en profonde mutation. Les tristes réalités – désertification, endettement, pollutions agricoles, solitude d'agriculteurs restant célibataires – ne doivent pas cacher les profonds changements qu'ont su impulser, parfois contraints et forcés, de très nombreux paysans.

    Pour que la gauche séduise les campagnes, elle doit changer en profondeur sa matrice culturelle. Elle doit notamment penser que le progrès social et humain sur lequel elle a construit son discours, peut également se développer dans ces campagnes dont les solidarités pourraient inspirer bien des territoires urbains en souffrance. François Hollande, s'il est élu, impulsera-t-il un nouveau rapport de la gauche au monde paysan ?

  • Hollande / Sarkozy : le match peut commencer

    Voilà donc la campagne réellement lancée avec l'acte de candidature posé par le Président de la République pour un second mandat. Remarquons que le fait d'avancer d'un mois l'annonce de hollande-sarkozy.jpgcette candidature (initialement, le calendrier prévoyait une campagne courte, sur le thème : « Le Président gouverne jusqu'au bout ») traduit une inquiétude sérieuse à l'UMP et dans les cercles élyséens. Le fait que les sondages pronostiquent invariablement un avantage sérieux de François Hollande au premier comme au second tour n'est pas pour rien dans ce qui ressemble à de la précipitation. Le pari de Nicolas Sarkozy est aussi simple que risqué : occuper le terrain massivement pour reprendre la main et stopper nette la domination du candidat socialiste. Ce faisant, le Président sortant donne le sentiment de ne plus être maître de son destin et de devoir pédaler de façon outrancière pour rattraper son retard. De quoi, une fois encore, brouiller l'image sereine et apaisée qu'il entendait – à son corps défendant – imprimer à sa candidature.

    A moins de dix semaines du premier tour de la présidentielle, essayons d'examiner les atouts, mais aussi les fragilités, des deux favoris, au regard de l'état de leur corpus idéologique et de la concurrence électorale qu'ils doivent affronter.

    FRANCOIS HOLLANDE

    Incontestablement, son début de campagne a été plutôt réussi. En termes de calendrier, il n'a rien changé alors même que les commentateurs, toujours un peu frénétiques, s'interrogeaient en Hollande 2012.jpgdécembre dernier sur un essoufflement possible. L'homme que d'aucuns disaient, de façon assez méprisante, inexpérimenté prouve dans cette campagne une maîtrise des événements et des nerfs que le camp d'en face doit envier. François Hollande a également su se tenir dans une bonne distance avec le Président en évitant de répliquer à chacune de ses attaques depuis un mois où la vraie-fausse campagne de Sarkozy est engagée. Il est apparu comme un candidat tranquille, sûr de lui, sans être arrogant et de ce point de vue-là, il offre un sérieux contre-modèle au candidat sortant qui pense, à tort, que créer un événement par jour va le réconcilier avec les Français.

    Même s'il fait figure de favori, François Hollande n'est pas exempt de fragilités davantage autour de son programme que de sa personnalité. Car, tout de même, qui peut croire que le dauphin de Lionel Jospin qui a dirigé le principal parti d'opposition pendant une dizaine d'années n'ait pas la capacité de gérer le paquebot France? Il lui faudra sans doute quelques semaines pour être parfaitement « au jus », mais faire croire aux Français que cela peut être un handicap lourd pour le pays est non seulement peu crédible, mais est potentiellement contre-productif pour la droite. Deux grandes questions entourent le projet Hollande :

    1/ A-t-il un vrai destin à proposer aux Français ?

    François Hollande parle régulièrement de rêve français mais quel contenu lui donne-t-il ? On a souvent le sentiment qu'il suffirait de rétablir en le rafraichissant quelque peu le modèle républicain classique - que le Président sortant aurait soigneusement détricoté - pour s'en sortir. Si la critique est assez juste, elle oublie de dire que ledit modèle était gravement en crise quand Nicolas Sarkozy a pris le pouvoir. Vouloir remettre une bête malade dans l'état où elle était en 2007 n'est pas un projet très convaincant. Vouloir rétablir « l'égalité des chances », par exemple en mettant plus de moyens (emplois, école...) dans les quartiers défavorisés, n'a de sens que si les inégalités ne sont pas aussi criantes qu'elles le sont aujourd'hui. Sinon, cela se résumera mettre un pansement sur une jambe déjà gangrénée. Même si la période ne se prête pas à toutes les innovations possibles, François Hollande devra identifier les leviers qu'il souhaite activer pour changer la donne.

    De même sur la question écologique complètement escamotée dans cette campagne (le choix de la candidate d'Europe écologie les Verts n'y est pas pour rien), François Hollande devra indiquer si c'est un vrai vecteur de changement politique ou si c'est un simple gadget pour séduire un électorat écologiste en déshérence. La question du nucléaire ne peut résumer l'équation environnementale et on aimerait que Hollande soit un peu plus explicite sur ce qu'il entend faire pour accompagner la mutation écologique de la France.

    2/ Aura-t-il les moyens de ses ambitions ?

    Du haut de ses 80 balais bien tassés, Michel Rocard a une fois encore soulevé un lièvre. Les prévisions de taux de croissance sur lesquelles le programme socialiste (notamment les créations de poste dans l'éducation nationale et le désendettement français) a été établi seraient exagérement optimistes. Il n'est pas le seul à jouer ce petit jeu dangereux, mais en l'occurrence, ce classique est particulièrement dangereux par les temps qui courent. Que ferait-il si la récession s'installait durablement en France et en Europe, si les taux d'intérêt s'envolaient suite à la dégradation de la note de la France ? A-t-il un plan B et dans ce cas-là, pourquoi n'en parle-t-il pas ? Certes, on peut comprendre qu'un candidat à l'élection suprême ne souhaite pas se présenter en « apporteur de mauvaises nouvelles », mais ne risque-t-il pas de semer de nouvelles désillusions ? La situation en Grèce montre la fragilité de nos démocraties dans lesquelles le pouvoir national joue parfois un rôle de figurant. Le bon score prévisible de Jean-Luc Mélenchon devrait d'ailleurs compliquer la donne pour François Hollande qui va devoir gauchir son discours pour rassembler au second tour, sans pour autant décrébiliser sa candidature et faire paniquer les fameux marchés.

     

    NICOLAS SARKOZY

    L'équation pour le Président sortant est encore plus compliquée. Pour justifier sa nouvelle candidature, il indique vouloir continuer le travail accompli pendant cinq ans. Sauf que le jugement sarko candidat.jpgdes Français sur son bilan quinquennal est très négatif, y compris dans les domaines où il semblait exceller, comme la sécurité. L'argument est donc à double tranchant et il devra s'en méfier s'il ne veut dévisser dans les sondages.

    L'argumentaire très identifié à droite (valeur travail, immigration...) qui a été mis en avant dans l'interview-programme donnée au Figaro magazine a pour objectif d'aller repêcher des voix en déperdition chez Marine Le Pen. Il serait plus utile que le candidat fasse un bilan crédible de son action en n'omettant pas les zones d'ombre. La volonté de braconnage de Nicolas Sarkozy sur les terres frontistes est doublement risquée. D'une part, elle réinstalle Le Pen au centre du débat en légitimant une partie de ses thèses (voir les déclarations du poisson-pilote Guéant) et lui donne une occasion de rebondir. La très fûtée Marine Le Pen aura beau jeu de dire que Nicolas Sarkozy ne va pas au bout de la logique souverainiste, à savoir la remise en cause de la zone euro et du « libre-échangisme mondialisé ». Dans ce contexte, le Président sortant prend le risque de faire remonter le score du FN qui pourrait d'ailleurs venir concurrencer sérieusement le candidat soutenu par l'UMP. Risqué pour le premier tour ! Quant au second (tour), il va être beaucoup plus compliqué de récupérer une bonne part des voix centristes effrayées par les appels du pied en direction de l'extrême droite.

    Sans doute, les spin doctors qui entourent le Président sortant ont-ils quelques cartouches en réserve pour faire décoller la candidature de leur poulain. Ils vont en tout cas vouloir nous en persuader. Mais dans ce jeu de poker-menteur qui se déploie actuellement, il n'est pas sûr que l'équipe qui phosphore dans le vase-clos élyséen n'envoie pas dans le mur le combattant opiniâtre, mais parfois peu lucide, qu'est Nicolas Sarkozy.

  • Hollande : équipe-choc ou auberge espagnole ?

    Sur le front de la présidentielle, cette semaine a été animée par deux évéments d’intérêt inégal en apparence. D’une part, nous avons assisté au feuilleton des négociations entre PS et Europe écologie les Verts (EELV). Tragicomique, serait le mot qui convient le mieux puisque les deux partis ont voulu nous faire croire qu’une absence d’accord était possible. En fait, même si PS et EELV n’ont pas évolué d’un iota sur les sujets qui les divisent (l’EPR et l’aéroport nantais), l’un et l’autre ne pouvaient se permettre de se quitter sans aucun texte, fût-il de circonstances : François Hollande parce qu’il ne pouvait se mettre à dos la sensibilité écologiste en vue du second tour de la présidentielle ; les « écolos » parce que la constitution d’un groupe à l’Assemblée suppose de dégager des circonscriptions occupées par des « socialos ». On s’étonnera cependant que les seules pommes de discorde aient concernées des points certes importants, mais qui ne constituent pas l’olpha et l’omega de la politique française. Faut-il en conclure que sur la politique économique, la lutte contre la crise financiaro-économique, les deux partis sont totalement en phase ? Les symboles sont importants en politique (l’EPR et l’aéroport en sont), mais ils sont insuffisants pour gouverner.françois hollande,pierre moscovici,jack lang,arnaud montebourg

     

    D’autre part, le candidat Hollande a dévoilé son staff de campagne, proposant un organigramme d’une cinquantaine de noms. A y regarder de plus près, on ne peut manquer d’être étonné par deux points essentiels qui ne sont pas sans interroger sur la suite de la campagne.

     

    1/ Est-ce une équipe de campagne ou un avant-gouvernement ?

    Même si les sondages restent encore très avantageux pour le candidat socialiste, la victoire est loin d’être assurée. Nicolas Sarkozy a beau trainer quelques casseroles (un bilan plus que moyen, une situation économique dégradée, une fragilité financière, des affaires impliquant certains de ses proches…), il est en capacité de rebondir ou du moins de se présenter en rempart face aux périls qui menacent notre pays. Dans ce contexte, Hollande a besoin d’une équipe cohérente et de combat, capable d’être sur tous les fronts.. Alors à quoi sert-il d’avoir une armée mexicaines avec des généraux fatigués (à l’image d’un Jack Lang qui était déjà dans le staff de campagne en 1981 !) et des colonels qui se détestent mutuellement ? Comme il lui est trop souvent reproché, François Hollande a composé une équipe en fonction d’équilibres savants entre sensibilités historiques du PS et proches des divers candidats de la primaire. Le candidat semble être resté dans les habits de premier secrétaire du PS qu’il a endossés pendant une décennie. Il va devoir fendre l’armure : pour être l’homme d’une espérance, il va devoir prendre quelques risques et se dévoiler un peu. Il est à craindre que cette organisation hautement complexe révèle très vite des failles et des dysfonctionnements. Quelle sera l’utilité, par exemple, des « représentants particuliers » (en la personne de Lang, Anne Hidalgo, Gérard Collomb et Christiane Taubira) alors que le candidat a déjà quatre porte-parole sans oublier son monsieur communication (Manuel Valls) et  le porte-parole du PS (Benoît Hamon) ? A quoi serviront exactement les « représentants des candidats à la primaire », eux aussi membres de l’équipe ? Certes, il fallait éviter de se les mettre à dos, comme avait réussi à le faire à la perfection Ségolène Royal, mais ne pouvait-on pas faire autrement que de rassembler sans grande cohérence des personnes ?

     

    2/ L’élan de la primaire se serait-il déjà évanoui ?

    Plus rien ne devait être comme avant, le peuple avait pris le pouvoir et exigeait d’être associé plus étroitement à la chose publique, affirmait-on au soir du 16 octobre. Une demande de renouvellement de la pratique politique et de ceux qui la font s’était exprimée fortement via la candidature de Montebourg (qui est absent de l’organigramme de campagne, serait-ce un signe ?)

    Un mois après, on voit réapparaître une pléiade d’anciens ministres de Jospin ou de Mitterrand (Moscovici, Sapin, Trautmann, Bartolone, Lebranchu et toujours Lang), la garde-rapprochée de Hollande (Sapin, Le Foll, Le Roux, Cahuzac, Le Drian…), mais très peu de têtes nouvelles ou alors à des fonctions de second plan (l’économie sociale et solidaire, le numérique…). Surtout, pourquoi reproduire à l’infini cette vision gouvernementale de la politique ? Il était tout à fait possible de construire des équipes autour de trois ou quatre priorités fortes : la place de la jeunesse (de façon symptomatique, la question de la jeunesse est associée à celle de l’éducation, comme si elle ne concernait pas également le travail, le logement, le sport, la culture, etc.), la refonte de la fiscalité, la lutte contre l’économie financiarisée (en intégrant la recherche d’une stratégie européenne)… Au lieu de construire une usine à gaz, Hollande avait la possibilité d’avoir une approche beaucoup plus transversale de la politique, en identifiant mieux les grands enjeux proposés par le candidat.

     

    françois hollande,pierre moscovici,jack lang,arnaud montebourgUn dernier mot sur le choix des personnes. Pierre Moscovici a été nommé directeur de campagne. Le plus parisien des députés du Doubs ne manque pas de talent notamment dans les débats, avec un sens de la formule qui fait mouche. Sauf que depuis quinze ans, on cherche en vain une idée originale qu’aurait porté « Mosco ». Sauf que son passage aux affaires européennes a laissé le souvenir davantage d’un dandy que d’un ardent militant de la cause (alors même que la gauche était à la tête de la grande majorité des gouvernements européens). Et puis, ne tournons pas autour du pot : sa proximité historique avec Dominique Strauss-Kahn est un facteur de fragilisation potentiel pour le candidat. Vu le nombre d’affaires auxquelles semble être associé DSK, le nom de Moscovici est déjà cité et pourrait l’être de nouveau, ce qui constituerait alors un angle de tir idéal pour la droite.

     

    A l’aune de ce risque, calculé ou non, on s’étonne que Hollande n’ait pas pris un risque plus intéressant : faire émerger des têtes nouvelles, issues notamment des couches peu présentes dans le débat politique. Aucune personne handicapée n’est ainsi membre de l’équipe Hollande, comme s’il fallait être gens du sérail, entre soi. A part les « belles » porte-parole, aucune femme n’occupe de rôle de premier plan. Quant à la demi-douzaine de « personnes issues de la diversité », elles sont généralement « planquées » (à l’organisation de la campagne ou sur des thèmes secondaires), à l’exception de la porte-parole Najat Vallaud-Belkacem qui avait déjà servi pour la campagne de 2007. Pas une grande nouveauté donc !

     

    Le souci manifeste qu’a François Hollande de rassembler son camp peut lui éviter les couacs qui avaient émaillé la campagne de sa devencière et ex-compagne. Pour autant, il va devoir donner envie, faire adhérer à un espoir aussi fragile soit-il. Il n’est pas sûr qu’en faisant de la politique comme du temps de « grand-papa » François, il y parvienne…

  • DSK : le bal des hypocrites, acte II

    Maintenant que la personnalité de Dominique Strauss-Kahn semble éclairée suite aux révélations sur la « filière » de prostitution autour du Carlton de Lille dont aurait bénéficié l'ancien patron du FMI, voilà que ses « amis » sont aux abonnés absents. Plusieurs articles dans la presse ont révélé leur écœurement devant la multiplication des affaires de mœurs concernant leur « ami Dominique ». Leur ligne de défense est assez simple : nous ne savions rien de cette face complètement cachée de DSK. Cette réponse est assez piquante car les mêmes nous expliquaient, en mai-juin, la main sur le cœur, qu'ils le connaissaient suffisamment pour savoir qu'il n'avait pas pu faire « ça », autrement dit violer la femme de chambre du Sofitel (décidément, on n'a jamais autant parlé des hôtels de luxe ces dernières semaines...).

    Aujourd'hui, quatre mois plus tard, ces mêmes amis soutiennent qu'ils ignoraient tout des activités sexuelles, débridées et tarifées, de leur champion. Peut-être, mais alors on s'interroge : le connaissaient-ils ou ne le connaissaient-ils pas ? Il faudrait savoir. Si c'est la première hypothèse, alors ils ne pouvaient rien ignorer des pulsions puissantes de DSK et de son appétit sexuel quasi-insatiable. Pourquoi dès lors ne pas imaginer qu'un viol ait pu se produire dans cette fameuse chambre ? Il ne s'agissait pas d'accuser leur « ami », mais au moins, de rester prudent et de ne privilégier aucune thèse. Au lieu de cela, la victime était forcément une affabulatrice, assoiffée d'argent (alors que les proches de DSK, c'est bien connu, n'aiment pas l'argent...).

    Si c'est la seconde hypothèse (ils ne le connaissaient pas tant que cela), là aussi pourquoi ne se sont-ils pas tenus à une prudence de bon aloi ? La nature humaine et les affres de la sexualité étant ce qu'elles sont – compliquées -, il était tout de même présomptueux d'affirmer que DSK n'avait pas pu violer Nafissatou Diallo. Il serait cruel de leur poser la question aujourd'hui : prudemment, il dirait tout ignorer de ce qui s'est vraiment passé dans cette chambre du Sofitel...

    Tous ces amis auto-proclamés ou réels de DSK nous ont mentis. Et pour la plupart, sciemment. Même s'ils ignoraient sans doute tel ou tel détail de sa vie personnelle, ils savaient que « Dominique » était ultra-fragile et que les femmes étaient son talon d'Achille. Ils ont dû, à maintes reprises, à Sarcelle, à Paris, à New-York ou ailleurs, se démener comme de beaux diables pour étouffer telle ou telle affaire, quitte à monnayer le silence de l'une ou de l'autre des victimes. Il fallait que DSK « tienne », au moins jusqu'à la présidentielle qu'il était sûr de dominer impérialement. Après son élection à l'Elysée dans un fauteuil, ces spin doctors espéraient sans doute que la fonction présidentielle allait l'assagir, que sa libido omniprésente pourrait se transférer sur la chose politique. Sacrés apprentis sorciers ! Car ce scénario pouvait nous mener tout droit à un issue à la Berlusconi... A-t-on besoin de cela pour notre pays qui s'enfonce, mois après mois, dans la déprime généralisée et n'est pas à l'abri, quoiqu'en disent les cercles du pouvoir, d'une catastrophe économique ?

    Tous ces proches de DSK (expression qu'ils vont désormais réfuter puisqu'ils ne savaient pas...) étaient prêts à tout pour le faire élire en mai prochain. Qu'importe, au passage, si cet aveuglement aura abouti à la catastrophe pour leur « ami ». Aujourd'hui, Dominique Strauss-Kahn est la risée du monde entier, s'invite dans tous les cafés et les repas de famille pour des blagues d'un goût douteux. Il est partout dans la rubrique des faits divers et complètement évacué des articles politiques. Sauf pour recueillir les jérémiades de ceux qui voulaient poursuivre avant l'été les personnes qui mettaient en cause la version de DSK dans l'affaire du Sofitel.

    Voilà donc où l'idolâtrie en politique peut conduire. On l'a vu, dans un registre moins grave, avec l'humiliation qu'a subie Ségolène Royal lors des primaires. Le soutien inconditionnel à une personne, aussi brillante et charismatique soit-elle, favorise tous les aveuglements et finalement est source de mensonges. On espère que les apprentis sorciers qui ont manœuvré pendant des mois pour dissimuler la face inavouable de DSK (malade, pour reprendre le juste pronostic de Michel Rocard) sauront se souvenir de la terrible leçon d'une affaire qui a jeté encore un peu plus de discrédit sur notre démocratie déjà bien mal en point.