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Parti socialiste - Page 7

  • 10 mai 81 : se souvenir ou vénérer ?

    Tout le monde ne parle que de ça depuis quelques jours. En tout cas, tous ceux qui s'intéressent un tant soit peu à la politique et qui ont une trentaine bien frappée. Au cas où cela vous aurait Mitterrand.jpgéchappé, on fête, en ce 10 mai, les 30 ans de la victoire de François Mitterrrand à l'élection présidentielle. Chacun y va de ses souvenirs, de sa mélancolie et je vous ferai grâce des miens même s'ils restent bien ancrés dans ma mémoire. Le lecteur attentif aura noté que ce blog porte le nom de cet événement, marquant de façon très claire le début de ma « passion » pour la chose politique. Donc, pas question pour moi de cracher dans la soupe, même s'il est légitime de regarder à quoi elle ressemble trois décennies plus tard.

    Pourquoi revenir sur cette phase historique abondamment commentée par les gazettes, les écrans et les ouvrages? Parce deux aspects ont, à mon avis, été insuffisamment commentés et méritent d'être développés. Dans cet intérêt, au moins médiatique, pour le 10 mai 1981, il y a, me semble-t-il, une fascination pour une façon de faire de la politique tout à fait différente. Même si, depuis Vichy jusqu'à sa mort, Mitterrand a été une « bête politique », il exerçait son art de façon quasi artisanale.

    Un documentaire, diffusé dimanche 8 mai sur France3, racontant cette journée vue par les deux adversaires du second tour, indiquait qu'après avoir appris sa victoire aux alentours de 18-19 heures, le nouveau Président avait continué de souper comme si de rien n'était, dissertMitterrand affiche.jpgant sur le climat du Morvan. Ensuite il avait tranquillement rédigé, sur un coin de table dans sa modeste chambre "de VRP", selon le documentaire, le discours qu'il prononcerait devant le pays tout entier après son visage a apparu sur les écrans de télé à 20 heures pétantes. Qui peut penser qu'aujourd'hui, un finaliste de la présidentielle attende la fin de la journée pour rédiger un discours historique ? On le voyait ensuite rentrer tranquillement dans la nuit humide de ce 10-11 mai vers la capitale, installé devant à côté de son fidèle chauffeur.

    Aujourd'hui, un tel trajet serait escorté par une myriade de caméras, de téléphones portables (se rappeler de la « traversée de Paris » de Jacques Chirac lors de sa victoire en 1995), sans oublier un ballet d'hélicoptères. Ce qui a rendu la fête de victoire inoubliable, c'est ce côté amateur, cette supériorité du mot sur l'image. Et c'est d'ailleurs pourquoi les images de la fête de la Bastille et de milliers d'autres plus ou moins improvisées ont ce charme désuet : elles ne sont pas fabriquées. En (re)vivant ce moment si particulier, les Français oublient les moeurs politiques actuelles marquées par la règle de la petite phrase, le règne des conseillers et sondeurs et (trop souvent) le piège de la pensée vide. A presque tous égards, le souvenir idéalisé (et donc déformant par rapport à la réalité) de François Mitterrand leur fait oublier la présidence calamiteuse, au moins sur le style - « Casse-toi, pov' con ! » - de Nicolas Sarkozy.

    L'autre point qui me frappe, c'est l'absence de tout regard critique mesuré sur François Mitterrand. Cet homme qui a été haï à droite et (parfois) à gauche devient un modèle pour (presque) tout le monde. Comme pour de Gaulle – mais pour lui, les raisons se comprennent davantage à cause de sa résistance acharnée au nazisme -, on lui dresse une statut du Commandeur. Cela aboutit à oublier les critiques ou du moins à en atténuer la portée. Il ne s'agit pas de remuer le couteau dans la plaie, en oubliant l'abolition de la peine de mort, la décentralisation, les libertés pour les étrangers et pour l'expression publique sans compter la 5e semaine de congés payés, mais tout de même, comment ne pas rappeler le règne du cynisme, l'usage des écoutes téléphoniques à des fins personnelles, l'aveuglement devant l'enrichissement de certains ou devant les crimes de Touvier sans oublier le renoncement à s'attaquer avec férocité contre le chômage de masse ?

    Tous ces petits et grands scandales, cette aisance dénuée de scrupules à se mouvoir dans un monde de paillettes (la 5e chaine concédée à Berlusconi), comme s'il fallait profiter de ce dont on été si longtemps privé, ont fait un mal terrible à la gauche. Celle-ci ne peut plus se réclamer de la vertu, ne peut plus invoquer l'affrontement entre la lumière et l'ombre (qu'avait cité, je crois, Jack Lang). D'une certaine manière, c'est tant mieux car à vouloir absolutiser la politique, à l'apparenter au discours religieux (vérité/erreur), on se trompe sur sa nature éminemment matérialiste : changer les choses pour espérer donner à chacun la possibilité de s'épanouir en lien avec les autres.

    Pour autant, les renoncements à toute éthique, notamment lors de la funeste période 1991/1993 (sur deux premiers ministres, l'une a été « carbonisée », l'autre s'est suicidé), ont introduit un soupçon indélibile sur l'honnêteté des politiques. Il n'est pas sûr que les gardiens du temple mitterrandien (les Lang, Charasse, Védrine et autres Bergé...) aient pleinement conscience de l'héritage étonnamment ambigu que nous laisse le premier - et seul à ce jour – président de gauche de la Ve République. Et de la difficulté, pour 2012, à faire adhérer la population à une promesse de changement.

  • Quatre leçons pour un scrutin à oublier

    Le second tour des élections cantonales a finalement confirmé, dans ses grandes lignes, le premier. La divine surprise espérée par la droite, pour faire oublier ses résultats calamiteux du 20 mars, n'a pas été au rendez-vous. Malgré l'implantation, parfois ancienne, de ses candidats, malgré un scrutin cantonales,marine le pen,nicolas sarkozy,martine aubry,cécile duflot,jean-luc mélenchonqui favorise (favorisait?) les notables locaux, la droite a dû abandonné entre deux et quatre départements (la Loire et la Savoie ont encore une issue incertaine) sans compter deux départements d'Outre-mer alors que l'UMP reprend un seul département (le Val d'Oise) en raison de la division locale, là où voici peu Dominique Strauss-Kahn faisait la pluie et le beau temps.

    Au regard de ces deux dimanches (faiblement) électoraux, quels enseignements tirer dans la perspective du scrutin majeur à venir, la présidentielle de 2012?

    1/ Le mode d'élection des conseillers généraux est complètement désuet.

    Rien n'a changé fondamentalement depuis la IIIe République qui avait fait du département le niveau de consolidation du pouvoir républicain, encore fragile, avec la figure centrale du préfet. Le conseil général était alors chargé de relayer le message républicain en échange d'une reconnaissacantonales,marine le pen,nicolas sarkozy,martine aubry,cécile duflot,jean-luc mélenchonnce toute symbolique. La France était alors majoritairement rurale, avec une forte stabilité géographique et des réseaux familiaux très puissants. Voilà pourquoi des dynasties, radicales, conservatrices, se succédaient pendant des décennies. Mais avec la décentralisation, la montée du fait urbain, les profondes transformations sociologiques liées aux Trente Glorieuses puis à la crise destructrice, la figure du canton a perdu beaucoup de signification pour les moins de 60 ans. S'est superposé à cela la montée de l'intercommunalité qui a encore brouillé la lisibilité du rôle du conseiller général puisque sa circonscription correspond rarement aux limites des communautés de commune, et a fortiori d'agglomération. Aujourd'hui, nous avons deux fois sur trois des conseillers généraux inconnus des électeurs, désignés par moins de 15 % de ceux-ci (pour un élu à 52 % avec 30 à 35 % de participation). Il fallait modifier ce mode de scrutin complètement décalé avec le XXIe siècle, pas forcément en en finissant avec le département, comme l'avait souhaité la commission Attali (car le département joue un rôle utile en matière sociale, notamment). Deux pistes de réforme étaient envisageables. La première consistait à s'inspirer du mode scrutin des municipales dans les communes de plus de 3500 habitants : une élection à la proportionnelle avec une prime majoritaire à la liste arrivée en tête. L'autre, plus audacieuse, serait de prendre appui sur les structures intercommunales qui maillent maintenant tout le territoire, pour désigner des représentants au conseil départemental. Chaque scénario présente un inconvénient majeur: le premier de donner la part belle aux partis et aux logiques d'appareil ; le second de s'appuyer sur des structures encore jeunes dont la légitimité démocratique est contestable (puisque les élus de ces structures ne sont pas désignés directement par les électeurs). Au lieu de cela, le gouvernement a choisi une solution technocratique qui n'est pas gage de clarification avec un conseiller territorial, élu dans le cadre de super-canton qui siégera à la région et au département. C'est une façon de légitimer le cumul des mandats et surtout cela fragilise la vie des deux collectivités, notamment la région, puisque les élus seront plus porteurs des intérêts de leur petit territoire que du grand. Mais la gauche qui n'a su faire évoluer le système (pour ne pas mécontenter son réseau d'élus?) est mal placée pour critiquer, car l'anachronisme ne pouvait perdurer longtemps.

    2/ La droite est dans le pétrin et ne sait comment en sortir.

    Comme je l'ai expliqué ici dans mon précédent post, sa stratégie est maintenant guidée par la peur. Peur de se fairecantonales,marine le pen,nicolas sarkozy,martine aubry,cécile duflot,jean-luc mélenchon éliminer du second tour de la présidentielle; peur d'être accusé de « mollesse » par le FN sur les questions de sécurité et d'identité nationale (d'où les nouveaux dérapages verbaux du bien peu inspiré Claude Guéant) ; peur de se faire rappeler ses promesses non tenues de 2007 notamment sur le pouvoir d'achat et la valorisation du travail.

    L'entre deux-tours a laissé apparaître les failles qui s'élargissent dans la majorité présidentielle. La consigne du « ni-ni » (ni FN, ni front républicain) a été très peu suivie par l'électorat dans le cas de duels FN – gauche. Selon une enquête Ipsos réalisée avant le second tour (citée par Le Monde dans son édition du 29 mars), plus de la moitié des électeurs UMP n'ont pas respecté la consigne de la direction nationale, deux tiers d'entre eux annonçant voter pour la gauche, un tiers pour l'extrême droite. La volonté de se faire bien voir des électeurs de « Marine » n'a pas non plus été payante car , dans le cas de duels gauche-droite, la plupart d'entre eux ont refusé de choisir. Désobéissance par rapport à la consigne Copé/Sarkozy et dédain des électeurs FN pour les candidats UMP... l'addition est salée pour la droite présidentielle qui ne sait plus à quel saint se vouer. Dans son fief des Hauts-de-Seine, deux divers droite, à Neuilly et à Levallois-Perret, l'emportent sur des sarkozystes pur jus, notamment dans le canton détenu naguère par Nicolas Sarkozy. Même si beaucoup se demandent tout bas si le président sortant ne les emmène pas au casse-pipe électoral, ils ne seront pas très nombreux à faire état de leurs doutes. Et la comédie du pouvoir va continuer avec le slogan qu'aimait tant l'ancien premier ministre Alain Juppé: « droit dans les bottes! ».

     

    3/ Le FN s'ancre profondément dans le pays.

    Tous les médias ont parlé de déception pour le FN qui comptait engranger une dizaine de conseillers généraux et n'en récolte que deux. Effet d'optique car l'enjeu pour ce parti était marginalement le nombre de ses élus, plus sûrement sa capacité à perturber le jeu traditionnel. Encantonales,marine le pen,nicolas sarkozy,martine aubry,cécile duflot,jean-luc mélenchon se qualifiant pour le second tour dans 400 cantons et en rendant chèvre l'UMP sur l'attitude à adopter à son égard, Marine Le Pen a dominé le jeu électoral. Les résultats du second tour, même s'ils ont pu décevoir les leaders du FN – et rassurer les démocrates – doivent être regardés attentivement. Du premier au second tour, ses candidats ont gagné près de 300 000 voix alors même que la participation a faiblement progressé. Cela veut dire que le FN a des réserves de voix et peut encore progresser. Un sondage publié dans la dernière édition de Marianne sur les abstentionnistes indiquait qu'environ un tiers d'entre eux, s'ils se déplaçaient, pourraient voter pour le FN (contre environ 15% pour l'extrême gauche et le reste pour les partis de gouvernement). Pour la première fois de sa déjà longue histoire, le FN mord sur le coeur du monde du travail, à travers quelques responsables syndicaux locaux (CGT, CFTC, CFDT et même Sud) qui ont pris le dossard FN pour ce scrutin. Cela était totalement inimaginable voici une dizaine d'années car le FN apparaissait alors comme un parti pro-patronal. Dans une France qui se déchaîne contre les privilégiés du CAC-40, qui voue aux gémonies les banquiers et le monde de l'argent, Marine Le Pen apparaît être un espoir pour une fraction non négligeable qui reste sur le bas côté de la mondialisation. Non pas pour qu'elle assume des fonctions politiques de premier plan (qui y croit vraiment?) mais pour qu'elle « foute la frousse à ceux d'en-haut ». La fracture élite/peuple qui était apparue clairement lors du référendum européen de 2005 s'accentue, et même si le Front de gauche récolte quelques dividendes, c'est d'abord le FN qui en fait son beurre. A refuser de voir cette réalité en face, la classe politique se condamne à des gueules de bois à répétition.

    4/ La gauche l'emporte, mais risque l'éparpillement.

    Les formations de gauche, à l'exception des écologistes plutôt euphoriques avec le doublement de leurs élus et le triomphe électoral dans le Bade-Wurtemberg, sont restés calmes devant l'effondrement de la droite. D'une part, parce que les conquêtes espérées, notamment dans la Sarthe de François Fillon ou le Rhône de Michel Mercier, ne sont pas au rendez-vous. Ensuite, parce que le FN taille des croupières dans l'électorat de gauche dont une partie doute réellement de la capacité de la gauche de gouvernement à lui redonner espoir. Enfin, et cette donnée a été peu soulignée par les observateurs, parce que ses fiefs traditionnels sont contestés de plus en plus ouvertement. Dans les Bouches-du-Rhône, dans le Nord, dans l'Aude ou ailleurs, le vieux socialisme, volontiers clientéliste, parfois affairiste, est lui aussi décalé avec les aspirations profondes de l'électorat. D'où la perte de sièges ici ou là qui devraient pousser les appareils à renouveler leur personnel et leurs pratiques. Il en sera sans doute rien tellement les élus locaux dans les grandes fédérations vont être choyés dans la campagne pour les primaires qui démarrent au lendemain de ces cantonales, dont les résultats ne sont pas à la hauteur de l'effondrement de l'UMP.

    Europe écologie/les Verts a raison d'être satisfait de sa performance. La formation écologiste gagne des élus sur des terrains peu favorables historiquement à ses thèses (Haute-Vienne, Indre-et-Loire, Meurthe-et-Moselle...) et elle l'emporte dans un certain nombre de duels face à des sortants socialistes un peu usés. Pour autant, la greffe écologiste dont le drame japonais a accru la légitimité ne prend pas dans les territoires les plus fragiles. A l'exception de Sevran (en raison de la conversion écologiste du maire ex-PCF), les candidats écologistes ne sont pas jugés en phase avec les préoccupations d'un électorat très paupérisé. Même si la critique du « toujours plus consommer » pourrait avoir une résonance dans cette population étranglée par la vie chère et les crédits à la consommation, l'écologie apparaît comme un luxe de bobos, en tout cas de membres de la classe moyenne qui ne vivent dans la hantise des fins de mois difficiles. Quant au Front de gauche, ses bons résultats – avec la conservation de deux départements et la conquête de quelques sièges notamment dans le Massif central – sont difficiles à interpréter. S'agit-il d'un succès de la stratégie de radicalisation de la gauche de la gauche, initiée par Jean-Luc Mélenchon et suivie vaille que vaille par le PCF? Ou alors cela traduit-il la bonne implantation de certains élus communistescantonales,marine le pen,nicolas sarkozy,martine aubry,cécile duflot,jean-luc mélenchon qui savent se rendre utiles à la population? Sans doute un peu les deux.

    Toujours est-il que la gauche est plus fragmentée que jamais et qu'il sera bien difficile de construire une plate-forme commune sur des sujets aussi sensibles que le nucléaire, la construction européenne ou la question du pouvoir d'achat. Les mois qui arrivent ne vont pas être de tout repos pour les négociateurs des partis de gauche. Espérons simplement que Marine Le Pen, avec son discours simpliste et ses formules lapidaires, n'engrangent pas trop de soutiens pendant cette période où la gauche comme la droite vont chercher un leader et/ou un programme...

  • PS: faire le ménage devant sa porte

    Alors que le pouvoir essaie de faire diversion en vantant les racines chrétiennes de notre pays (ça ne mange pas de pain!) et en lançant un débat périlleux sur l'islam (qui ne peut que pJean-Noël Guérini, arnaud montebourg, georges frêche, martine aubry, gérard collombrofiter à une Marine Le Pen en pleine ascension), on a quelque gêne à s'intéresser à la cuisine interne du PS. Cela paraît assez mesquin en ces temps de turbulence arabe. Et pourtant, l'affaire du rapport Montebourg sur la fédération socialiste des Bouches-du-Rhône est révélatrice de la duplicité des appareils politiques.

    Que dit le candidat à la candidature socialiste dans un rapport qui, nous dit-on, aurait dû rester confidentJean-Noël Guérini, arnaud montebourg, georges frêche, martine aubry, gérard collombiel? Que cette fédération dirigée par le sénateur et président du conseil général Jean-Noël Guérini et qui, par le nombre de ses adhérents, est la troisième ou quatrième du PS, fonctionne selon des principes douteux, avec des systèmes de pressions personnelles, de chantage financier (puisque le conseil général délivre des subventions qui, du jour au lendemain, peuvent être supprimées) et d'obscures tractations sur le vote des militants.

    Généralement, le choix de la direction fédérale est suivi à 80% par les adhérents du département. Pourquoi dans les Bouches-du-Rhône (mais on pourrait également s'intéresser au Pas-de-Calais, à l'Hérault et, dans une moindre mesure, à la Seine-Maritime) n'y a-t-il pas la diversité politique que l'on connaît dans la plupart des autres fédérations? Y aurait-il un micro-climat qui expliquerait cette uniformité politique?

    L'hypothèse de la plupart des observateurs avisés de ces réalités, dont se fait l'écho Arnaud Montebourg, est la suivante: le patron de la fédé négocie nationalement son ralliement à tel ou tel leader, à tel ou tel courant, non pas sur la base d'une adhésion à un projet, mais selon le principe de marchands de tapis: « Si je t'amène 80% des voix des adhérents, tu me donnes quoi? ». Cela veut dire des places dans l'appareil socialiste et sJean-Noël Guérini, arnaud montebourg, georges frêche, martine aubry, gérard collomburtout l'impunité quant aux pratiques douteuses (on a vu ainsi certaines sections des Bouches-du-Rhône « dissidentes » dissoutes par la fédération et des effectifs ici ou là grossièrement gonflés). Lors du dernier congrès PS de Reims, Jean-Noël Guérini s'était rapproché de Gérard Collomb, autre grand féodal (lyonnais), pour négocier son ralliement à Ségolène Royal. Il était quelque peu cocasse de voir la dame du Poitou, adepte d'un discours volontiers moral, s'allier au Marseillais aux manières fort peu policées. Mais bon, business is business...

    Le plus surprenant dans cette affaire, c'est la réaction outragée de Martine Aubry: « Il n'y a rien dans ce rapport. Pas un élément concret, précis, pas un fait », a-t-elle osé déclarer. Cette réaction a également été entonnée par la gauche du PS et par quelques autres, sur le thème: on ne tire pas contre camp surtout à trois semaines d'un scrutin cantonal dans lequel le PS espère ravir quelques départements. Mais justement à quoi sert-il de conquérir de nouveaux territoires s'il s'agit d'y appliquer des méthodes de fonctionnement néo-féodales et anti-démocratiques?

    La preJean-Noël Guérini, arnaud montebourg, georges frêche, martine aubry, gérard collombmière secrétaire du PS refuse de voir la réalité en face, comme voici trois-quatre ans, l'ancienne direction ne souhaitait pas mettre son nez dans la fédé de l'Hérault, avant que l'équipe d'Aubry s'y implique au dernier moment avec le résultat calamiteux que l'on connaît (le triomphe de feu Frêche et la déroute de la maire de Montpellier aux élections régionales). Non seulement cet aveuglement aura à terme des conséquences désastreuses sur les positions de la gauche dans ce département (car la mise en examen d'Alexandre Guérini dans des affaires de marchés truqués pourrait bien rejaillir sur son frère), mais surtout il illustre le décalage entre le renouvellement des idées, actuellement à l'œuvre, quoique de façon tempérée, au sein de l'appareil socialiste, et les pratiques locales qui parfois sont restées aussi archaïques (embrigadement et absence de débat).

    Ce fossé est d'autant plus fâcheux que Martine Aubry vient de s'exprimer dans un livre (« Pour changer de civilisation », éd. Odile Jacob) sur les valeurs de la gauche et sur ses principes d'action. L'un des premiers devrait être de faire le ménage dans les écuries socialistes pour que les fonctionnements les plus choquants soient bannis du parti. Mais évidemment, cela donnerait des armes à la droite locale – pas beaucoup plus ragoutante – et ferait perdre quelques milliers de voix dans le cadre de la compétition locale pour les primaires. Mais faut-il compromettre ses beaux principes pour un plat peu appétissant de lentilles, fussent-elles à la sauce marseillaise?

     

  • DSK: pourquoi tant d'emballement?

    Alors que le monde est suspendu à la situation dramatique en Libye et la fuite en avant du dictateur Kadhafi - ami du ministre Ollier et admiré, entre autres, par le nouvel ambassadeur français à TDSK, Marine Le Pen, JL Mélenchon, médiasunis-, alors que le monde arabe vit une mutation sans précédent, voilà que nos médias français (franchouillards, oserais-je écrire) se passionne pour un non-événement: la venue à Paris pour une réunion financière du directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Bien entendu, tout le monde guettait un signe tangible de son intérêt pour 2012, tout en sachant bien que sa position internationale ne lui permettait pas de prendre position. Cela d'ailleurs lui aurait été reproché car, au vu de la situation tendue sur les marchés (notamment ceux des matières premières), une option de DSK sur la présidentielle aurait pu encore plus compliquer la situation internationale. N'oublions pas que l'onde de choc dans le monde arabe est lourde de conséquences pour le pétrole. Un renchérissement brutal des cours de l'or noir aurait raison de la timide reprise économique dans le monde occidental et on peut comprendre que le patron du FMI ait d'autres soucis que la présidentielle française (même il doit y penser de temps en temps, pas simplement en se rasant...).

    Et voilà que nos bons médias s'emballent, jaugent une déclaration de sa femme sur son blog (qu'elle tient depuis belle lurette) et spéculent déjà sur un duel Sarkozy-DSK. Cette façon de précipiter l'agenda et de dicter aux Français le duel auquel tout le monde (dans les grands médias) rêvent ne peut qu'accroître les fractures dans l'opinion publique. Mais pensez donc, un tel duel serait si alléchant. Deux fauves de la politique face à face, chacun ayant côtoyé les grands de ce monde, chacun ayant construit de solides réseaux dans les milieux politiques, patronaux et médiatiques. Comme on prête à Sarko comme à DSK des casseroles (sans qu'on sache si elles seraient d'ordre personnel ou financier) qui pourraient sortir à cette occasion, les « observateurs » de la vie politique voient dans ce duel tous les ingrédients réunis d'une pièce à rebondissements.

    Et le débat politique dans tout ça? Il a été encore une fois oublié. Comme l'a dit avec justesse François Hollande, c'est le directeur général du FMI qui s'est exprimé, pas le candidat putatif à la présidentielle. Qu'il se soit permis d'égratigner indirectement la gestion Sarkozy ne prouve rien, si ce n'est que DSK n'a pas oublié qu'il appartenait à la gauche française.

    Fin d'un épisode (sans grand intérêt). Mais réfléchissons à ce que cette spectacularisation de la vie politique pourrait amener. La classe politique subit dans l'opinion un discrédit très fort. En tout cas, celle qui passe l'essentiel de son temps dans les palais parisiens de la République. Le tableau est connu et nul ne peut le contester. Les médias souffrent eux aussi d'un manque de crédibilité qui n'est pour rien dans la crise économique que traverse la presse écrite. Outre quelques ratés mémorables, on leur reproche d'être trop proches des puissants et de se désintéresser du quotidien des Français. Malheureusement, tout n'est pas faux dans ce tableau, même si le discours conspirationniste (voir des complots partout) qui l'entoure souvent est totalement réducteur.

    Dans ce tableau sombre, la tentation des médias à vouloir annoncer un duel DSK/Sarkozy est non seulement risquée (on devrait se rappeller comment Balladur en 1995 puis Jospin en 2002, chouchous des médias, ont été éliminés dès le premier tour), mais dangereuse. Elle fait le lit du discours protestataire qui monte un peu partout dans la société. Celui-ci a beau jeu de comparer la fortune de DSK (d'autant que ses émoluments faramineux de DG du FMI ne sont pas soumis à l'impôt) au goût prononcé de l'argent de notre Président. En gros, l'héritier contre le nouveau riche. Cette thématique risque de ne pas servir celui qu'on veut lancer dans l'arène, DSK, mais d'alimenter le discours de Marine Le Pen (et accessoirement celui de Jean-Luc Mélenchon). Celle-ci atteindrait déjà 20% d'intentions de vote dans un récent sondage et ses marges de progression sont réelles. La candidature sous la bannière FN aux cantonales d'un syndicaliste de la CGT, ancien militant de l'extrême gauche, témoigne, même si le cas reste encore isolé, d'un attrait pour le discours plus social et ultra-laïque de la fille Le Pen (lire mon post du 13 décembre).

    Vouloir discréditer l'éventuelle candidature de DSK au nom de sa fortune revient non seulement à donner du crédit aux thèses de l'extrême droite, mais à tuer le débat politique. On ne peut pas démolir un politique sur ce que sa naissance – ou son mariage – lui a donné. La critique doit porter sur la cohérence de son parcours (avec une question que j'ai du mal à trancher: peut-on avoir une gestion plus à gauche du FMI?) et surtout sur ses propositions. S'il s'avérait que le candidat des socialistes (en supposant que la primaire d'octobre le désigne) faisait preuve de frilosité dans l'indispensable lutte contre les inégalités et dans la redistribution des richesses, on pourrait alors se demander s'il est toujours de gauche et si sa fréquentation de la haute finance internationale (qu'il a habilement critiquée sur France2) n'a pas déteint sur ses convictions. Mais à l'heure d'aujourd'hui, tout procès d'intention à l'égard de DSK est déplacé. Il sert plus le FN que l'UMP, empêtré dans ses contradictions et ses ratages diplomatiques en rafale.